Un grand merci à BQHL Editions pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray de « Peter Ibbetson » de Henry Hathaway.
« Les amours d’enfance sont des choses futiles et vite oubliées »
Arraché à son amie Mimsy alors il n’avait que huit ans, Peter Ibbetson ne vit que dans l’espoir incertain de la retrouver. Désormais architecte à Londres, il reçoit pour mission de rénover les écuries du duc de Towers, dont l’épouse l’attire irrésistiblement. Au moment où il découvre que la duchesse et Mimsy sont une seule et même femme, il tue son mari armé dans un geste de légitime défense. Condamné à la prison à perpétuité, Peter Ibbetson n’en continue pas moins à vivre sa passion éperdue, relié à celle qu’il aime tant par la pensée et le rêve…
« Le bonheur ne se trouve pas à l’extérieur mais à l’intérieur de soi-même »
Ex-enfant de la balle ayant grandi entre les scènes de théâtre où travaillaient ses parents et les plateaux de cinéma sur lesquels il multiplie, enfant, les apparitions, Henry Hathaway exerces différents métiers de techniciens au sein des studios avant de pouvoir réaliser ses propres films à la faveur de l’avènement du cinéma parlant. Considéré parfois à tort comme un simple exécutant aux ordres des studios, il mènera une longue et prolifique carrière longue de plus de quarante ans durant laquelle il réalisera une soixantaine de films. Et même s’il toucha un peu (et avec la même réussite) à tous les genres – du drame (« Niagara ») au film noir (« Appelez Nord 777 », « Le carrefour de la mort ») en passant par la comédie (« La marine est dans le lac ») ou le film de guerre (« La pagode en flammes ») – son nom demeure assurément associé à une certaine idée du cinéma d’aventures hollywoodien. Qu’il soit exotique (« Les trois lanciers du Bengale », « La cité disparue »), costumé (« La rose noire ») ou westernien (« Le jardin du diable », « L’attaque de la malle-poste », « Cent dollars pour un shérif »).
« Une petite fille m’obsédait depuis l’enfance. Votre visage est le seul qui a su me faire oublier le sien et rendre ma vie supportable »
Réalisé en 1935, « Peter Ibbeston » est un film véritablement à part dans la carrière du cinéaste en ce qu’il demeure probablement son unique véritable incursion dans l’univers du mélodrame romantique. Adaptation du roman éponyme de George du Maurier (grand-père de la célèbre Daphné, auteur de « Rebecca » et « Ma cousine Rachel »), le film est centré sur le destin de deux jeunes enfants épris l’un de l’autre se retrouvant séparés par le destin avant de se retrouver, fortuitement, à l’âge adulte, sans possibilité de pouvoir vivre leur amour. Teinté de surréalisme (le film fut parait-il fortement apprécié par André Breton), le récit imagine pour les amoureux une échappatoire oniriquepuisque, liés par une connexion spirituelle, ils trouvent la possibilité de se retrouver et de s’aimer librement dans leurs rêves. Et ainsi d’échapper à leur destin tragique. Par un subtil effet de miroir, le scénario joue en permanence sur un système d’opposition de valeurs entre le réel (séparation, emprisonnement, souffrance) et le rêve, terre de liberté et d’hédonisme pour mieux nous vanter la pureté de l’amour des deux protagonistes (encore une fois en opposant le charnel terrestre et le spirituel du rêve). Avec au fond toujours cette idée selon laquelle la vie ne vaut d’être vécu sans amour. Un mélodrame flamboyant et romantique à l’extrême, qui flirte néanmoins parfois avec une certaine forme de mièvrerie. Porté par un couple de comédiens délicieux (Gary Cooper et Ann Harding) et une mise en scène élégante, ce « Peter Ibbetson » reste quatre-vingt ans après sa sortie un sommet du cinéma romantique qui ravira à n’en point douter les esprits les plus sentimentaux. Et ce même si le film parait tout de même un peu désuet.
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Le blu-ray : Le film est présenté dans un Master Haute-Définition, en version originale américaine (2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.
Côté bonus, le film est avantageusement accompagné d’une présentation du film par Maxime Leroy, maître de conférence en littérature britannique du XIXème siècle (2021, 58 min.), de « Peter Ibbetson, histoire d’un rêve » : présentation du film par Bertrand Tavernier et Noël Simsolo (2008, 26 min.) et d’un « Portrait de Henry Hathaway » par Patrick Brion, Bertrand Tavernier et Noël Simsolo (2008, 26 min.).
Édité par BQHL Editions, « Peter Ibbetson » est disponible en blu-ray depuis le 6 octobre 2021.
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