Un grand merci à BQHL Editions pour m’avoir permis de découvrir et de chroniquer le blu-ray du film « F.I.S.T. » de Norman Jewison.
« Les casseurs sont les payeurs, telle est la politique de la maison »
En 1937, à Cleveland, Johnny Kovak et Abe Belkin, deux manutentionnaires, sont injustement licenciés et deviennent membres de la Fédération des Camionneurs. Johnny prend progressivement conscience de l'influence qu'il exerce sur les syndiqués. Mais, au cours d'une grève longue et difficile, afin de faire face aux milices patronales, il n'a d'autre choix que d'accepter l'aide du racketteur Vince Doyle et de ses complices...
« Syndiquez-vous pour qu’on soit fort. Cette force sera la nôtre ! »
A Hollywood comme ailleurs, la réussite est souvent avant tout une question de persévérance. Sylvester Stallone en sait quelque chose, lui aura passé une décennie à courir le cachet en multipliant les apparitions (le plus souvent muettes) à l’écran sans réussir à percer. De « Bananas » (Woody Allen) à « Klute » (Pakula) en passant par « Capone » (Steve Carver) ou « Adieu ma jolie » (Dick Richards). C’est que, pendant longtemps, les cinéastes ne savaient pas trop quoi faire de son physique musculeux et de son visage en biais. Son salut viendra d’un scénario qu’il a lui-même écrit – l’histoire d’un boxeur amateur venu du peuple et qui gagnera sur le ring et à la force de ses poings le respect de tous – et qu’il refuse de vendre si on ne lui confie pas le rôle-titre. On connait la suite : « Rocky » sera un carton international, trois fois oscarisé, et qui propulsera instantanément Stallone au rang de star. De plus, l’acteur sera alors identifié par les spectateurs comme l’icône de la working class et du monde prolétaire. Une image qu’il n’aura ensuite de cesse de cultiver au cours des décennies suivantes (« La taverne de l’enfer », « Rambo », « Le bras de fer » …). Mais le succès de « Rocky » permet aussi à Stallone d’accéder à des projets ambitieux et à des cinéastes de premier plan, comme à l’occasion de son film suivant, « F.I.ST. », réalisé par Norman Jewison, cinéaste connu notamment pour sa capacité à traiter de sujets de société importants dans des productions assez mainstream (« Dans la chaleur de la nuit », « Rollerball », « Hurricane Carter »).
« T’as décidé une grève ? Tu flirtes avec la mort ! Personne dans cette ville n’est capable de faire plier les patrons »
Avec « F.I.S.T. » (acronyme de « Federation of inter-state truckers » et faisant littéralement référence au poing qui se dresse pour combattre), Norman Jewison s’intéresse à la question des luttes ouvrières et de l’histoire syndicale américaines, au travers de l’ascension (et de la déchéance) de Johnny Kovak, ancien manutentionnaire qui gravira un à un les échelons jusqu’à devenir président du puissant syndicat national des routiers. Une ascension fulgurante due notamment à sa ténacité et à l’âpreté de ses méthodes pour tenir tête et faire plier le patronat. Mais le cinéaste rappelle aussi que derrière chaque victoire se cache un revers de médaille pas toujours glorieux : pour faire plier le patronat, Kovak a ainsi besoin de l’appui de la mafia, dont il devient éternellement redevable. A l’évidence, le film s’inspire de façon assez libre et à peine voilé de la vie de Jimmy Hoffa, figure éminemment controversée du syndicalisme américain mystérieusement disparu trois ans plus tôt et dont il dénonce les dangereuses accointances avec l’Outfit de Chicago. Mais de façon plus large, il dresse un portrait passionnant de l’évolution de la classe ouvrière américaine et de ses combats pour obtenir une amélioration de sa condition. De même qu’il porte un regard très réaliste et très pertinent sur le monde syndical, éminemment politique, et ses luttes de pouvoir internes. En cela, « F.I.S.T. » est une réflexion morale sur l’exercice même du pouvoir qui finit toujours par corrompre et avilir les hommes, y compris les plus sincères dans leur démarche. Et ce même s’ils œuvrent au final pour l’intérêt du plus grand nombre. Avec ce film puissant et d’une grande acuité, Jewison fait ici, d’une certaine manière, le deuil d’une part du rêve américain et de son idéal de démocratie. Sans aucun doute l’un des meilleurs films de Stallone.
****
Le blu-ray : Le film est présenté dans un Master Haute-Définition et proposé en version originale américaine (2.0) ainsi qu’en version française (2.0). Des sous-titres français sont également disponibles.
Côté bonus, le film est accompagné d’une présentation signée David Da Silva, historien du cinéma et auteur du livre « Sylvester Stallone, héros de la classe ouvrière ». Un livret de 24 pages vient également compléter avantageusement le film.
Édité par BQHL Editions, « F.I.S.T. » est disponible en blu-ray ainsi qu’en DVD depuis le 25 novembre 2021.
La page Facebook de BQHL Editions est ici.