[CRITIQUE] : Flee

Par Fuckcinephiles

Réalisateur : Jonas Poher Rasmussen
Acteurs : -
Distributeur : Haut et Court
Budget : -
Genre : Documentaire, Animation.
Nationalité : Danois, Français, Norvégien, Suédois, Américain, Zambien, Slovaque, Estonien, Espagnol, Italien, Finlandais.
Durée : 1h23min.
Synopsis :
L'histoire vraie d'Amin, un Afghan qui a dû fuir son pays à la fin des années 80 alors qu'il n'était qu'un enfant. Trente ans plus tard, désormais universitaire au Danemark, il va confier à son meilleur ami la véritable histoire de son voyage et de son combat pour la liberté.


Critique :

Véritable expérience cathartique à la réalisation inspirée, entre la séance thérapeutique et le confessionnal attentif, #Flee se fait le témoignage vivant et vibrant d'un homme qui a fuit toute son existence, incapable de s'arrêter par peur de la persécution ou même de la mort. pic.twitter.com/9vdORTPiiK

— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) May 31, 2022

Et si l'animation était l'outil cinématographique le plus fort de la fiction, pour raconter une voire tout simplement son histoire ?
Si Marjane Satrapi avait répondu par l'affirmative à cette cruciale question avec son sublime Persepolis, le tandem Amin Nawabi/Jonas Poher Rasmussen lui emboîte sensiblement le pas avec le formidable Flee, mélange hybride entre le documentaire intime et le film d'animation par rotoscopie si chère à Richard Linklater, exprimant à la perfection la puissante et déchirante odyssée d'un homme vers la liberté.
Soit Amin, dont la vie rocambolesque et douloureuse est retracée à travers les points les plus essentiels, débutant dans son enfance dans le Kaboul de la fin des années 80, où se jouaient les dernières convulsions plus où moins directes de la guerre froide; une époque où son père fût emmené un pour « interrogatoire » par le gouvernement communiste ayant renversé la monarchie du pays en 1979, avant qu'il n'ait plus jamais aucune nouvelle de lui.

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Élevé par sa mère et ses frères et sœurs aînés, il découvrira avec l'aide de sa passion pour les films de Jean-Claude Van Damme, qu'il est homosexuel dans une société où elle est réprimée - pour ne pas dire éradiquée -, et une famille pas encore prête à l'accepter.
Lorsque les autorités afghanes tentent d'enrôler le frère d'Amin dans l'armée, la famille fuit de Kaboul à Moscou, où elle tente à plusieurs reprises de migrer vers l'Ouest.
Évitant constamment la police russe corrompue tout faisant face au trafic d'êtres humains abject et impitoyable, Amin est témoin de dégradations déchirantes et de tentatives d'évasion infructueuses, dont un voyage particulièrement éprouvant dans une coque de bateau dépouillée sur la mer Baltique.
Quand, enfin, il est capable de descendre d'un avion au Danemark, il devient in adolescent réfugié alors que sa famille a été dispersée à travers l'Europe, avec un frère et deux sœurs heureusement à proximité en Suède...
Véritable expérience cathartique, entre la tendre séance thérapeutique et le confessionnal attentif qui prend tout son sens intime lors des conversations introspectées entre Rasmussen et Amin, Flee se fait le témoignage vivant et vibrant d'un homme qui a fuit toute son existence ou presque, incapable de s'arrêter par peur de la persécution ou même de la mort, et qui arrive enfin à un moment de sa vie certes toujours aussi anxieux mais qui lui permet de réfléchir sur qui il est et ce qu'il a vécu, pour tenter d'arriver à une acceptation fragile de lui-même et de son passé, et ainsi construire solidement son avenir avec son mari.

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À travers ce cocktail extraordinaire de réflexions personnelles et de réalisations inspirées, le film donne un semblant de lyrisme aux sorts cruels et difficiles connus par les migrants, entre la perte de leurs racines culturelles, la discrimination, le danger auxquels ils sont continuellement confrontées où encore l'assimilation souvent complexe d'une nouvelle culture.
Dans cette quête de sens au coeur d'un monde frappé par la violence, la haine et l'ingérence politique, Flee incarne presque une lueur d'espoir pour une humanité à l'agonie et en nous partageant son histoire, Amin Nawabi nous fait le plus beau des cadeaux.
Jonathan Chevrier