[CRITIQUE] : The Humans

Par Fuckcinephiles

Réalisateur : Stephen Karam
Acteurs : Richard Jenkins, Jayne Houdyshell, Amy Schumer, Beanie Feldstein, Steven Yeun,...
Distributeur : Mubi France
Budget : -
Genre : Drame, Comédie.
Nationalité : Américain.
Durée : 1h47min.
Synopsis :
Trois générations de la famille Blake sont réunies pour fêter Thanksgiving dans l'appartement new-yorkais exigu de Brigid et de son petit ami Richard. Alors que le soleil se couche, les frustrations et les angoisses de chaque membre de la famille se dévoilent, et des secrets bien cachés refont surface.


Critique :

Transformant le récit cataclysmique d'un banal dîner de Thanksgiving en un portrait émouvant, grotesque et angoissant d'une famille dysfonctionnelle,#TheHumans se fait une ghost story où les personnages sont hantés non pas par un lieu où des esprits, mais uniquement par eux-mêmes pic.twitter.com/E1Jgb5fmm3

— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) August 12, 2022

Alors qu'il n'arbore aucun trope ni tic du cinéma horrifique, The Humans de Stephen Karam - qui adapte sa propre pièce éponyme - est peut-être, déjà, l'expérience cinématographique la plus angoissante de l'année, lui qui est cantonné à une sortie en catimini sur la plateforme Mubi, avec une promotion sensiblement proche du néant.
Porté par une ambiance austère et aussi chaleureuse qu'une porte de prison, le film concentre toute son attention sur la famille Blake, dont les membres se réunissent dans un petit argument exigu du sud de Manhattan, pour le sacro saint dîner de Thanksgiving.
Un cadre de vie réduit et qui laisse à peine entrer la lumière naturelle, qui ne fait que concentrer la claustrophobie ambiante autant que les tensions inhérentes qui vibrent entre chacun des personnages, une cocotte minute qui ne demande qu'à imploser.

COURTESY OF A24


Transformant lentement mais sûrement le récit cataclysmique d'une soirée difficile d'une famille américaine comme les autres à Thanksgiving, en un portrait aussi émouvant qu'il est furieusement grotesque et angoissant qui ne se veut jamais comme une mise en images des traumas d'une famille dysfonctionnelle, mais bien une dissection racée et troublante à la subtilité tchékhovienne de ce dysfonctionnement, qui se reflète jusque dans le moindre recoin inquiétant de l'appartement (des fissures sur le plafond, des taches d'eau sur les murs, des bruits sourds et effrayants là où l'extérieur est étonnamment silencieux,...).
Chaque personnage semble littéralement étouffé par ses pensées et son ressentis, errant de pièces en pièces avant de tout faire exploser dans un déchaînement de cruauté qui démontre l'ambivalence d'une famille où tous se soucient un minimum les uns des autres, mais ne peuvent s'empêcher de se traiter avec une insensibilité rare.
Un film de maison hanté férocement sophistiqués et aux accents expressionnistes très Polanskiens, où des personnages désespérés et merveilleusement incarnés par un casting totalement voué à sa cause, sont hantés non pas par un lieu où des esprits, mais uniquement par eux-mêmes.
Jonathan Chevrier