[CRITIQUE] : Là où chantent les écrevisses

[CRITIQUE] : Là où chantent les écrevisses

Réalisatrice : Olivia Newman

Acteurs :  Daisy Edgar-Jones, Taylor John Smith, Harris Dickinson, David Strathairn,...
Distributeur : Sony Pictures Releasing France
Budget : -
Genre : Drame, Thriller.
Nationalité : Américain.
Durée : 2h05min.
Synopsis :
Kya, une petite fille abandonnée, a grandi seule dans les dangereux marécages de Caroline du Nord. Pendant des années, les rumeurs les plus folles ont couru sur la " Fille des Marais " de Barkley Cove, isolant encore davantage la sensible et résiliente Kya de la communauté. Sa rencontre avec deux jeunes hommes de la ville ouvre à Kya un monde nouveau et effrayant ; mais lorsque l'un d'eux est retrouvé mort, toute la communauté la considère immédiatement comme la principale suspecte. À mesure que la vérité sur les événements dessine, les réponses menacent de révéler les nombreux secrets enfouis dans les marécages.

Critique :

Éliminant quasiment tous les éléments littéraires qui rendait son histoire prenante,#LàOùChantentLesÉcrevisses se fait une adaptation certes charmante sur quelques points mais surtout un brin creuse, qui ne laisse jamais le temps à ses images (tout comme son histoire) de respirer pic.twitter.com/uyUPpwz5vH

— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) August 16, 2022

Plus encore que le petit écran, le septième art peut s'avérer d'une rudesse impitoyable lorsqu'il s'échine à adapter/condenser les lignes d'un roman - à succès où non - qu'il dépouille sensiblement de l'essentiel : le pouvoir de l'imaginaire inhérent à la littérature, capable de mettre tous nos sens en éveil.
Dès lors, le risque est que tout défaut où faille dans sa structure n'en sera que plus exposé si le scénariste à la tête de l'adaptation, s'échine à en être le plus fidèle possible.
Et il en va de même pour toute trace d'invraisemblance, quelle que soit la finesse de l'écriture derrière, à tel point qu'il est trop souvent triste - mais juste - de dire que meilleur est le livre, plus son pendant sur grand écran incarne une expérience décevante.
Il n'est pas nécessaire d'avoir parcouru les 500 pages du roman Là ou chantent les écrevisses, pour déceler ce qui en a fait un véritable phénomène littéraire : à la fois romance YA, fable sur le difficile passage à l'âge adulte, polar procédural sur un meurtre mystérieux où encore mélodrame atmosphérique dans un cadre dépaysant à la description méticuleuse; le premier roman de Delia Owens sait suffisamment séduire son lecteur pour qu'il oublie joyeusement ses nombreuses lacunes.

[CRITIQUE] : Là où chantent les écrevisses

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Pour son adaptation cinématographique en revanche, échouée à Olivia Newman, ce n'est pas forcément la même limonade, elle qui est à la fois fidèle à son matériau d'origine (à ceci près qu'il offre une torsion significative à l'intrigue, puisque l'histoire de l'enfance et de l'adolescence de Kya est ici racontée en flashback, alors qu'elle est assise dans une cellule de prison en attendant son procès pour meurtre) et une oeuvre qui peine à exister par elle-même, incarnant plus une illustration qu'une adaptation à part entière.
Une mise en images trop lisse et soigneusement emballée pour être plausible - même avec une bonne dose corsée de suspension d'incrédulité -, bardée de personnages tellement sous-développés qu'il est difficile de ressentir quoi que ce soit pour eux, excepté Kya, dont on ressent la tristesse d'une existence définie par le rejet et la solitude, une môme qui a été une paria toute sa vie, ridiculisée et détestée parce que différente.
Une âme fougueuse et vulnérable férocement blessée par la vie, qui trouve réconfort et compagnie dans la nature, et qui, n'ayant jamais rien vécu à ce qui ressemble à une vie normale avec d'autres personnes, ne sait pas trop quoi faire de ses émotions. 
Le véritable souci reste cependant qu'à la différence du livre, on ne ressent jamais le lien de Kya avec son environnement, tant le film semble totalement dépourvu d'atmosphère, expurgé du monde brut et sauvage qui embaumait la prose poétique et dépaysant d'Owens, sa plume dépeignant les humeurs du marais autant que les créatures qui y vivent, prenant vie dans notre esprit grâce à la vigueur de son langage et à la minutie de ses descriptions.

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À l'image, jamais rien n'évoque la beauté incandescente qu'elle exprime, la photographie jouant bien plus la carte d'une bluette ordonnée et sans remous à la Nicholas Sparks que celle d'une odyssée exotique et imprévisible digne de l'attachement de son héroïne pour ce qui n'est pas uniquement sa maison, mais son seul et unique monde et sa constante préoccupation au quotidien.
Elle est réellement " la fille des marais ", elle ne perturbe jamais son ordre naturel, elle en fait totalement partie et il a une incidence direct sur ce qu'elle est.
Éliminant quasiment tous les éléments littéraires (détails environnementaux, atmosphériques, intimes,...) qui rendait son histoire fascinante et justifiait même la plupart de ses rebondissements dramatiques, Là où chantent les écrevisses se fait une adaptation certes charmante sur quelques points mais surtout sans surprise, sans aspérités et un brin creuse, qui ne laisse jamais le temps à ses images - tout comme son histoire - de respirer.
Oubliez les écrevisses du grand écran, mais pas leur version littéraire.
Jonathan Chevrier[CRITIQUE] : Là où chantent les écrevisses