Réalisateurs : Koji Morimoto, Tensai Okamura et Katsuhiro Ôtomo
Acteurs : -
Distributeur : Eurozoom
Budget : -
Genre : Animation, Science fiction.
Nationalité : Japonais.
Durée : 2h45min.
Date de sortie : 15 avril 1997
Date de ressortie : 24 août 2022
Synopsis :
Avec Memories, Katsuhiro Otomo achève sa transition du manga vers l'animation, déjà largement entamée quelques années auparavant, en 1987 avec Akira. Grâce à la complicité de deux autres monstres sacrés de l'animation japonaise, Koji Morimoto et Tensai Okamura, il nous livre un triptyque surréaliste, forcément mâtiné d'une couche de science-fiction. Sous la direction magistrale de ces trois immenses talents, les studios MadHouse et 4°C donnent vie à trois histoires tirées du manga du même nom, lui aussi écrit et dessiné par Katsuhiro Otomo. Les plans fusent, plus fous les uns que les autres, dans un déploiement de maîtrise technique et stylistique qui ont marqué l'histoire de l'animation contemporaine.
Critique :
Du space opera lyrique façon ghost story lugubre à la comédie noire absurde en passant par la satire antimilitariste, #Memories se fait une collection réfléchie de la SF moderne, un tour de force technique et esthétique à la fois grisant à contempler et troublant à déchiffrer. pic.twitter.com/5QFzmhdTIY
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) August 28, 2022
Rien n'est plus casse-gueule qu'une anthologie dont chaque pièce est composée par un cinéaste différent, une perspective d'autant plus fragile que la majorité des édifices n'ont pas fondamentalement de conception claire - même ceux avec un thème directeur au départ.
Un écueil dans lequel ne tombe pas Memories, petit bijou d'animation complexe et grisante scindée en trois parties offrant leur propre style et leur propre univers, comme autant d'adaptations de nouvelles nées de l'esprit foisonnant du génie nippon Katsuhiro Ōtomo.
Résultat fragmentée de la créativité d'un homme dégainer à travers trois sensibilités cinématographiques - faussement - dissemblables, le film adopte volontairement un montage déséquilibré pour mieux épouser sa propre forme d'équilibre où les thèmes se ressemblent et s'assemblent dans un balet des sens furieusement pessimiste quant à l'avenir d'un monde - et pas uniquement la société nippone - dont la déliquescence et la perte semblaient déjà inéluctable au coeur des 90s.
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Du space opera lyrique façon ghost story lugubre (Mangetic Rose de Koji Miromoto - avec Satoshi Kon au scénar -, merveille de pièce SF citant directement le Solaris de Tarkovski, sur une poignée de personnages consumés par leur passé, dans un cadre fané où l'opulence du vieux monde pourrie l'arrière-plan; un effort qui sonde l'aspect toxique de la nostalgie/mélancolie et combien s'emprisonner dans ses souvenirs peut rendre impossible la distinction entre ce qui est vrai/juste et ce qui n'est qu'illusion, au point de perdre l'emprise sur sa propre existence), à la comédie noire absurde (Stink Bomb d'Okamura Tensai, une satire mordante et brutale qui prend les contours d'un mélodrame ténébreux, vissée sur un employé de laboratoire qui ingère involontairement une concoction de guerre biologique sous la forme d'une pellicule, le faisant émettre un gaz nocif et toxique qui tue toute vie sur son passage; une charge comico-féroce sur l'incompétence et l'ingérence des institutions en place, dont la désolation autant que la noirceur cynique et le sentiment d'isolement/confusion du héros sur son triste sort, citent directement le cinéma de Romero) en passant par la satire antimilitariste (Cannon Fodder d'Otomo himself, qui va encore plus loin que le segment précédent dans la satire, portrait édifiant d'une société à la1984 en état de guerre permanent contre un ennemi qui n'existe - probablement - pas, sous fond d'oppression et d'exploitation de la classe ouvrière obligé de se soumettre), Memories se fait une collection réfléchie de la SF moderne, un tour de force technique et esthétique (surtout Cannon Fodder) à la fois grisant à contempler et troublant à déchiffrer.
Jonathan Chevrier