Réalisateurs : Daniel Kwan et Daniel Scheinert
Avec : Michelle Yeoh, Ke Huy Quan, Jamie Lee Curtis, Stephanie Hsu,…
Distributeur : Originals Factory
Budget : -
Genre : Science-fiction, Action, Comédie
Nationalité : Américain
Durée : 2h19min
Synopsis :
Evelyn Wang est à bout : elle ne comprend plus sa famille, son travail et croule sous les impôts… Soudain, elle se retrouve plongée dans le multivers, des mondes parallèles où elle explore toutes les vies qu’elle aurait pu mener. Face à des forces obscures, elle seule peut sauver le monde mais aussi préserver la chose la plus précieuse : sa famille.
Critique :
Le multivers, idée de génie ou boîte de pandore ? La réponse, dans le cadre du cinéma et du divertissement populaire, est forcément liée à notre appréciation de l’univers Marvel depuis quelque temps. L’abondance qu’il promet est-elle une bonne chose cependant ? Rien n’est moins sûr quand on voit le désastre scénaristique que cela engendre. Obtenir tout, partout, tout le temps, dans le cadre d'œuvres audiovisuelles, ne serait-ce pas une hérésie au final ? Vous avez quatre heures.
Mais avant de vous lancer dans une réflexion intense à coup de thèse, antithèse, synthèse, prenez le temps de vous plonger dans le nouveau film des Daniels (Daniel Kwan et Daniel Scheinert), six ans après la sortie (directement en DVD chez nous) de Swiss Army Man, leur premier long métrage. Everything, Everywhere All at Once (que l’on peut traduire littéralement par Tout, Partout, Tout à la fois) promet l’abondance, le frisson du divertissement pur, celui que l’on cherche à tout prix depuis la pandémie et la fermeture des cinémas. Le frisson ultime qui fera revenir le public en salle, en masse. Mais est-ce seulement possible ? À l’heure du cynisme, de l’appel perpétuel à la nostalgie et à la frilosité des studios par rapport au risque et au coût, les bons blockbusters se sont faits rares. Loin de nous l’idée de vous dire qu’un seul film peut révolutionner l’industrie, ni que le film des Daniels va changer le monde. Les cinéphiles étaient tellement en manque de ce frisson que l’euphorie engendrée par ce film se comprend (d’autant plus que l’on partage cette joie !).
Après Swiss Army Man et son cadavre flatulent, les cinéastes s'ouvrent au monde des femmes cinquantenaires frustrées, autoritaires et légèrement garces sur les bords. Michelle Yeoh incarne Evelyn Wang, propriétaire avec son mari d’un lavomatique. Les remises en question existentielles après un certain âge sont souvent l’apanage des hommes. Les femmes n’ont de toute façon pas le temps pour les regrets, ni l’aval de la société pour se le permettre. Découpé en trois parties, Everything, Everywhere All at Once suit Evelyn dans ce qui semble être un quotidien domestique bordélique et pénible : un père à charge, une fille boudeuse, un mari gentil mais un peu simplet et des galères d’impôt. Mais cette femme antipathique et peu engageante au premier abord devient, par hasard ou par coup du destin, le dernier rempart contre Jobu Tapaki, un être qui menace l’équilibre de tous les univers.
Le montage se fait alors dynamique, rythmé par des cut incessants, qui empêchent Evelyn de se concentrer sur la comptabilité. Le personnage est sollicité de toute part et entraîne le public dans ce tourbillon. La chose ne s’arrange pas quand l’univers fantastique se télescope avec la réalité d’Evelyn, sollicitée par de plus en plus de personnages dans le lieu le plus insolite pour ce genre de récit : le bureau des impôts. Son monde étriqué doit s’étendre au plus large possible si elle veut sauver tous les univers et les Evelyn qui y résident. Pas évident quand on a passé sa vie à se replier sur soi-même jusqu’à ne plus faire attention aux personnes que l’on aime.
Car avant d’être un film d’action démesuré, Everything Everywhere All at Once est surtout un film sur les regrets d’une femme immigrée, qui portent en elle les stigmates d’une éducation chinoise stricte qu’elle perpétue avec sa fille. Alors qu’elle a l’impression d’avoir raté sa vie, raté des opportunités de carrière, Evelyn peut apercevoir les autres vies qu’elle aurait pu vivre : elle aurait pu être cheffe cuisto, elle aurait pu être une star de cinéma maîtresse du kung-fu, elle aurait pu vivre une histoire d’amour avec une femme dans un monde où les doigts ressemblent à d’énormes saucisses. Les possibilités sont infinies. Mais c’est à elle et uniquement à elle, la Evelyn frustrée, de sauver le monde. Et il est rare de confier aux personnages féminins considérés comme des garces froides et autoritaires le soin d’être des héroïnes à part entière. Les Daniels nous offre non seulement un plaisir salutaire et universel devant une œuvre populaire mais aussi un récit spécifique sur l’immigration, la famille chinoise et ses dynamiques qui n’encouragent pas la communication.
Fourmillant de clins d'œil à des films cultes (allant de Ratatouille à In the mood for love), Everything, Everywhere All at Once développe une histoire étonnamment simple face à l’abondance de possibilités qu’offre le concept de multivers. Si la mise en scène se fait extravagante, si tout semble démesuré (mais à la mesure d’une salle de cinéma), les deux réalisateurs recentrent leur récit pour faire exploser l’émotion d’une famille déchirée par les non-dits, nous offrant un message que la saga Paddington ne renierait pas.
Laura Enjolvy
Avec : Michelle Yeoh, Ke Huy Quan, Jamie Lee Curtis, Stephanie Hsu,…
Distributeur : Originals Factory
Budget : -
Genre : Science-fiction, Action, Comédie
Nationalité : Américain
Durée : 2h19min
Synopsis :
Evelyn Wang est à bout : elle ne comprend plus sa famille, son travail et croule sous les impôts… Soudain, elle se retrouve plongée dans le multivers, des mondes parallèles où elle explore toutes les vies qu’elle aurait pu mener. Face à des forces obscures, elle seule peut sauver le monde mais aussi préserver la chose la plus précieuse : sa famille.
Critique :
#EverythingEverywhereAllatOnce développe un récit étonnamment simple face à l’abondance de possibilités qu’offre le concept du multivers. Si la mise en scène se fait extravagante, c'est pour mieux faire exploser l’émotion d’une famille déchirée par les non-dits. (@CookieTime_LE) pic.twitter.com/y4npdTSj57
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) August 29, 2022
Le multivers, idée de génie ou boîte de pandore ? La réponse, dans le cadre du cinéma et du divertissement populaire, est forcément liée à notre appréciation de l’univers Marvel depuis quelque temps. L’abondance qu’il promet est-elle une bonne chose cependant ? Rien n’est moins sûr quand on voit le désastre scénaristique que cela engendre. Obtenir tout, partout, tout le temps, dans le cadre d'œuvres audiovisuelles, ne serait-ce pas une hérésie au final ? Vous avez quatre heures.
Mais avant de vous lancer dans une réflexion intense à coup de thèse, antithèse, synthèse, prenez le temps de vous plonger dans le nouveau film des Daniels (Daniel Kwan et Daniel Scheinert), six ans après la sortie (directement en DVD chez nous) de Swiss Army Man, leur premier long métrage. Everything, Everywhere All at Once (que l’on peut traduire littéralement par Tout, Partout, Tout à la fois) promet l’abondance, le frisson du divertissement pur, celui que l’on cherche à tout prix depuis la pandémie et la fermeture des cinémas. Le frisson ultime qui fera revenir le public en salle, en masse. Mais est-ce seulement possible ? À l’heure du cynisme, de l’appel perpétuel à la nostalgie et à la frilosité des studios par rapport au risque et au coût, les bons blockbusters se sont faits rares. Loin de nous l’idée de vous dire qu’un seul film peut révolutionner l’industrie, ni que le film des Daniels va changer le monde. Les cinéphiles étaient tellement en manque de ce frisson que l’euphorie engendrée par ce film se comprend (d’autant plus que l’on partage cette joie !).
Copyright Leonine
Après Swiss Army Man et son cadavre flatulent, les cinéastes s'ouvrent au monde des femmes cinquantenaires frustrées, autoritaires et légèrement garces sur les bords. Michelle Yeoh incarne Evelyn Wang, propriétaire avec son mari d’un lavomatique. Les remises en question existentielles après un certain âge sont souvent l’apanage des hommes. Les femmes n’ont de toute façon pas le temps pour les regrets, ni l’aval de la société pour se le permettre. Découpé en trois parties, Everything, Everywhere All at Once suit Evelyn dans ce qui semble être un quotidien domestique bordélique et pénible : un père à charge, une fille boudeuse, un mari gentil mais un peu simplet et des galères d’impôt. Mais cette femme antipathique et peu engageante au premier abord devient, par hasard ou par coup du destin, le dernier rempart contre Jobu Tapaki, un être qui menace l’équilibre de tous les univers.
Le montage se fait alors dynamique, rythmé par des cut incessants, qui empêchent Evelyn de se concentrer sur la comptabilité. Le personnage est sollicité de toute part et entraîne le public dans ce tourbillon. La chose ne s’arrange pas quand l’univers fantastique se télescope avec la réalité d’Evelyn, sollicitée par de plus en plus de personnages dans le lieu le plus insolite pour ce genre de récit : le bureau des impôts. Son monde étriqué doit s’étendre au plus large possible si elle veut sauver tous les univers et les Evelyn qui y résident. Pas évident quand on a passé sa vie à se replier sur soi-même jusqu’à ne plus faire attention aux personnes que l’on aime.
Copyright Leonine
Car avant d’être un film d’action démesuré, Everything Everywhere All at Once est surtout un film sur les regrets d’une femme immigrée, qui portent en elle les stigmates d’une éducation chinoise stricte qu’elle perpétue avec sa fille. Alors qu’elle a l’impression d’avoir raté sa vie, raté des opportunités de carrière, Evelyn peut apercevoir les autres vies qu’elle aurait pu vivre : elle aurait pu être cheffe cuisto, elle aurait pu être une star de cinéma maîtresse du kung-fu, elle aurait pu vivre une histoire d’amour avec une femme dans un monde où les doigts ressemblent à d’énormes saucisses. Les possibilités sont infinies. Mais c’est à elle et uniquement à elle, la Evelyn frustrée, de sauver le monde. Et il est rare de confier aux personnages féminins considérés comme des garces froides et autoritaires le soin d’être des héroïnes à part entière. Les Daniels nous offre non seulement un plaisir salutaire et universel devant une œuvre populaire mais aussi un récit spécifique sur l’immigration, la famille chinoise et ses dynamiques qui n’encouragent pas la communication.
Fourmillant de clins d'œil à des films cultes (allant de Ratatouille à In the mood for love), Everything, Everywhere All at Once développe une histoire étonnamment simple face à l’abondance de possibilités qu’offre le concept de multivers. Si la mise en scène se fait extravagante, si tout semble démesuré (mais à la mesure d’une salle de cinéma), les deux réalisateurs recentrent leur récit pour faire exploser l’émotion d’une famille déchirée par les non-dits, nous offrant un message que la saga Paddington ne renierait pas.
Laura Enjolvy