gProduction germano-hongroise, Istvan Szabo qui est alors déjà un grand réalisateur avec des films "L'Âge des Illusions" (1965), "Contes de Budapest" (1977) ou "Mephisto" (1981), revient et porte à l'écran l'histoire vraie de Alfred Redl (Tout savoir ICI !) mais via l'adaptation de la pièce de théâtre "A Patriot for Me" (1965) de John Osborne, auteur qui a été aussi scénariste des films "Tom Jones" (1863) et "La Charge de la Brigade Légère" (1968) tous deux de Tony Richardson. Le réalisateur-scénariste co-signe le scénario avec Peter Dobai qu'il retrouve après "Mephisto" (1981) et avant "Hanussen" (1988). Le film est présenté au Festival de Cannes 1985 où il obtient le Prix du Jury avant d'obtenir le British Academy Film Award du meilleur film en langue étrangère 1986... Alfred Redl est fils d'une famille aristocrate désargentée qui a pu s'en sortir avec le soutien de l'Empereur ce qui a forgé son patriotisme exacerbé. Il obtient une bourse pour entrer dans un école militaire où il a l'ambition de grimper les échelons pour servir au mieux son Empereur. Mais son amour de l'Empereur et son patriotisme le pousse au zèle et donc à se faire des ennemis à une période où certains aimeraient que l'Empereur laisse sa place à l'aube du 20ème siècle...
Le casting est partagé entre acteurs allemands ou autrichiens et hongrois. Le rôle titre est incarné par Klaus Maria Brandauer qui retrouve donc son réalisateur de "Mephisto" (1981) et qu'il retrouvera dans "Hanussen" (1988), et qui a entre temps assis son statut en méchant face à 007 dans "Jamais plus Jamais" (1983) de Irvin Kershner et en jouant face à Robert Redford et Meryl Streep dans "Out of Africa" (1985) de Sydney Pollack. Son meilleur ami est interprété par Jan Niklas vudans "Operation Lady Marlene" (1975) de Robert Lamoureux, "La Nuit de l'Evasion" (1981) de Delbert Mann puis ensuite dans "La Maison aux Esprits" (1993) de Bille August, tandis que la soeur de ce dernier et amant de Redl est jouée par Gudrun Landgrebe vue cette même année dans "Palace" (1985) de Edouard Molinaro, "Yerma" (1985) de Imre Gyöngyössy et Barna Kabay puis "Berlin Affair" (1985) de Liliana Cavani. L'Archiduc est incarné par Armin Mueller-Stahl remarqué dans "Lola, une Femme Allemande" (1981) et "Le Secret de Veronika Voss" (1982) tous deux de Rainer Werner Fassbinder et qu'on verra plus tard dans des films comme "Le Roi des Aulnes" (1996) de Volker Schlöndorff ou "Les Promesses de l'Ombre" (2007) de David Cronenberg. Le mentor de Redlest incarné par Hans Christian Blech remarqué surtout dans les films de guerre "Le Jour le plus Long" (1962), "Morituri" (1965) de Bernhard Wicki, "La Bataille des Ardennes" (1965) de Ken Annakin ou encore "Le Pont de Remagen" (1969) de John Guillermin. Citons ensuite Andras Balint acteur fétiche de Istvan szabo depuis "L'Âge des Illusions" (1965) en passant par "Un Film d'Amour" (1970) et "25, rue des Sapeurs" (1973), Dorottya Udvaros révélée dans "Gueuse de Vie" (1984) de Peter Bacso, retrouvera Istvan Szabo dans "La Tentation de Vénus" (1991), "Sunshine" (1999) et "Taking Sides" (2001) et qui retrouvera dans "L'Horoscope de Jésus-Christ" (1989) de Miklos Jancso son partenaire Laszlo Galffi vu dans "Le Coeur du Tyran" (1981) également de Miklos Jancso et vu récemment dans "White God" (2014) de Kornel Mundruczo... Le destin de ce Albert Redl est passionnant car relie en filigrane deux événements historiques majeurs, l'affaire Dreyfus en 1894 et l'entrée en guerre de 1914, et entre deux le déclin de l'empire austro-hongrois des Habsbourg. Un empire énorme et multi-etnique ce qui n'est pas une sinécure dans une époque où les nations s'éveillent et où la géo-politique est une vraie partie d'échec. Derrière l'ambition patriotique de Redl c'est le destin de tout un pays qui se dessine.
Entre les moeurs et les minorités ethniques ("Pas de nouvelle affaire Dreyfus !" déclaré par l'Archiduc est une conséquence encre brûlante), entre les coulisses du pouvoir et les jalousies, Redl n'est qu'un pion qui se croit prince. Le réalisateur signe en quelque sorte le pendant austro-hongrois du chef d'oeuvre "Barry Lyndon" (1975) de Stanley Kubrick, à l'exception près non négligeable que ce dernier est un arriviste opportuniste alors que Redl est d'un patriotisme exacerbé sincère. Quand on pense à la fin de l'empire austro-hongrois au cinéma on pense aux acidulés "Sissi" (1955-1956) de Ernst Marischka, mais Szabo en prend judicieusement le contre-pied, dans une photographie terne et grisâtre qui imprime ainsi la chute d'un empire et qui symbolise la tristesse que pourrait par exemple ressentir Redl. Dans son ascension Redl est zélé et même impitoyable mais finalement se retrouve la victime collatéral d'une machination plus grand que lui. Une machination qui est par contre historiquement très discutable, le cinéaste préférant cette version pour mieux montrer le cynisme des manoeuvres politiques. Klaus Maria Brandauer offre une performance magistral pour un homme de devoir jusqu'à être aveuglé par son zèle. Un grand film auquel il manque un peu de panache ou de flamboyance pour atteindre les meilleurs films du genre.
Note :
17/20