[CRITIQUE] : Black Adam

Par Fuckcinephiles

Réalisateur : Jaume Collet-Serra
Acteurs : Dwayne Johnson, Pierce Brosnan, Aldis Hodge, Noah Centineo, Quintessa Sindwell, Sarah Shahi,...
Distributeur : Warner Bros. France
Budget : -
Genre : Action, Fantastique.
Nationalité : Américain.
Durée : 2h05min.
Synopsis :
Dans l’antique Kahndaq, l’esclave Teth Adam avait reçu les super-pouvoirs des dieux. Mais il en a fait usage pour se venger et a fini en prison. Cinq millénaires plus tard, alors qu’il a été libéré, il fait régner sa conception très sombre de la justice dans le monde. Refusant de se rendre, Teth Adam doit affronter une bande de héros d’aujourd’hui qui composent la Justice Society – Hawkman, le Dr Fate, Atom Smasher et Cyclone – qui comptent bien le renvoyer en prison pour l’éternité.


Critique :

Trop pressé qu'il est d'être un divertissement global rattachant tous les wagons du Worlds of DC, se rêvant plus sombre qu'un moule familier qu'il suit pourtant scrupuleusement à la lettre sans jamais déborder, #BlackAdam est un blockbuster inoffensif, bourrin et à peine jouissif pic.twitter.com/ctfnXPX00Q

— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) October 19, 2022

En cette tendre époque de blockbusters surannés et - quasiment - tous plus génériques les uns des autres, vous pouvez presque juger de la qualité d'un film super-héroïque si vous en venez à bien plus parler de sa scène post-générique que du long-métrage en lui-même.
Ce qui était un apanage du MCU et, encore plus directement du Spider-verse de Sony, est désormais à mettre au crédit du Worlds of DC avec Black Adam de Jaume Collet-Serra qui pourtant, sur le papier, est autant un miracle et qu'une profession de foi au sein d'une jungle Hollywoodienne vampirisée par le genre super-héroïque, un blockbuster accouché dans la douleur - neuf ans de production - qui s'appuie non pas sur un superhéros familier dont on use de la popularité auprès du public cible, mais bien sur une espèce en voie de disparition : une vraie et imposante star du cinéma d'action, dont l'invincibilité a savamment été pensée et sculptée depuis des années aussi bien devant que derrière la caméra.

Copyright 2022 Warner Bros. Entertainment Inc. All Rights Reserved.


À l'écran en revanche, le nouvel effort de Jaume Collet-Serra ne semble jamais réellement profiter de ce statut à part, qui devient même presque une faiblesse face à un aussi cruel manque d'originalite, cas d'école d'une narration confuse, de direction artistique sans âme (soit c'est visuellement sombre, soit artificiellement distrayant) et de montage frénétique qui aspire la moindre once de fun de sa pourtant généreuse - mais confuse - action.
Pourtant, voir Dwayne Johnson incarner réellement un superhéros, qui plus est un qui n'est pas vraiment issu de l'âge d'or de la bande dessinée (débarqué en 1945, il est réapparu dans 70s pour devenir l'ennemi number one de Shazam/Captain Marvel), est un plaisir non feint tant il a indirectement endossé ce costume sur les deux dernières décennies, surtout dans la franchise Fast and Furious, et il ne lui manquait finalement plus qu'un éclair sur la poitrine pour rendre cela " réel ", et le fait est qu'il se glisse aussi naturellement dans un film du genre démontre instinctivement qu'il est l'élément le plus important de Black Adam.
D'autant que le bonhomme s'éclate en anti-héros à l'éthique ambiguë qui s'est réveillé du mauvais côté de la tombe et qui fait parler la foudre à la moindre petite contrariété, une machine à tuer qu'il ne faut décemment pas emmerder - surtout sous fond de Paint It Black des Rolling Stones.

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Mais sa qualité première est paradoxalement, aussi, sa plus grande faiblesse tant la puissance écrasante du Rock ne fait que refléter amèrement les contours génériques et le manque furieux de cohérence quant elle ne surdimensionne pas le cadre uniquement sur sa propre personne, tant la JSA ne semblent exister exclusivement qu'en tant que faire-valoir de luxe plutôt qu'en tant que véritables personnages multidimensionnels (malgré les excellents Aldis Hodge et Pierce Brosnan, respectivement dans les rôles de Hawkman et Doctor Fate), des Avengers extrajudiciaires par excellence détruisant des choses et des vies au nom du bien.
Un prisme qui aurait pu être formidable à analyser, puisqu'il place directement un anti-héros au coeur même de l'hypocrisie du statut super-héroïque, mais il est traité par-dessus l'épaule comme tous les autres traits intéressants de son histoire (la prise de pouvoir d'un ancien esclave, une nation sous-occupation, les ravages de l'Amérique impérialiste jamais remis en cause - pas même par son ONG super-héroïque -,...), à l'instar d'un MCU qui effleure ses idées politico-sociales et toute notion d'engagement par peur d'avoir réellement quelque chose de profond et consistant à dire (ce qui serait en totale contradiction avec le cynisme de la firme à sa tête), voire de trop brusquer les rouages d'une narration aux enjeux inexistants et au vilain gentiment oubliable.

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À quoi bon un grand pouvoir s'il n'y a pas de grande responsabilité ?
Si cette dichotomie hante quasiment toute la production super-héroïque actuelle, elle tourmente encore plus Black Adam, trop pressé qu'il est d'être un divertissement global rattachant tous les wagons (il sert autant d'introduction au personnage qu'à la JSA, tout en étant canon dans un univers où ils n'existaient absolument pas jusqu'ici... syndrome Les Éternels), se rêvant plus sombre qu'un moule qu'il suit pourtant scrupuleusement à la règle, sans jamais déborder.
Inoffensif, bourrin et à peine jouissif, le film incarne une vraie régression au coeur d'un Worlds of DC qui nous avait gentiment séduit - hors Wonder Woman 1984 - ces deux dernières années.
Non, une excitante scène post-générique ne fait décemment pas un bon film, et encore moins une séance mémorable...
Jonathan Chevrier