[CRITIQUE] : Emancipation

Par Fuckcinephiles

Réalisateur : Antoine Fuqua
Avec : Will Smith, Ben Foster, Charmaine Bingwa,...
Distributeur : Apple TV Plus
Budget : -
Genre : Action, Thriller, Drame, Historique.
Nationalité : Américain.
Durée : 2h12min.
Synopsis :
La glorieuse histoire de Peter, un homme qui échappe à l’esclavage grâce à son intelligence, son inébranlable foi et son amour pour sa famille. Entre des chasseurs sans pitié lancés à sa poursuite et les redoutables marais de la Louisiane, il part à la conquête de sa liberté.


Critique :

Cocktail étrange entre la bisserie nihiliste à l'action exagérée et le drame historique douteux à la violence hardcore, quelque part entre #12YearsASlave et #ThePatriot, #Emancipation n'en reste pas moins divertissant dans sa manière de célébrer un héroïsme purement Hollywoodien. pic.twitter.com/d3HUPWVh0h

— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) December 9, 2022

Force est d'admettre que sur le papier, fictionnaliser - enfin plutôt réimaginer - la vie d'un ancien esclave dont la photo (" The Scourged Back" ) de son corps, marqué par les vestiges abjectes de l'esclavage, fut publiée dans le Harper's Weekly Magazine en juillet 1863, avait quelque chose d'aussi intriguant que profondément casse-gueule, tant il n'est jamais aisé de remplir les chapitres d'une vie qui n'ont jamais été écrit (juste une brève interview), et encore plus dans la perspective d'en faire dès le départ, ce que l'on appelle vulgairement " un véhicule à Oscars ".
D'autant que si la présence de Will Smith ne semblait pas forcément dénoter de cette intention, celle derrière la caméra d'un Antoine Fuqua pas du tout coutumier de ce type de productions (très) académiques, avait de quoi faire tiquer un brin et laisser présager l'idée que le bien nommé Emancipation allait avoir tout du long le popotin de sa pellicule coincé entre deux fauteuils jamais vraiment fait pour lui.

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Bien moins un film sur l'esclavage dans le sillage de Glory et 12 Years a Slave, dont il retranscrit avec crudité la brutalité et l'inhumanité, qu'un film sur la liberté façon thriller/survival mâtiné d'une pointe d'actionner révolutionnaire, la péloche suit, au coeur de l'année 1863 et de la guerre civile américaine, Peter, un esclave qui a été enlevé à sa famille.
En apprenant parmi les esclavagistes qu'Abraham Lincoln a déclaré la liberté pour tous les esclaves, il décide de déclencher une évasion massive, le conduisant à errer dans les marais de la Louisiane où il espère constamment garder une longueur d'avance sur ses ravisseurs.
Une évasion qui sert de toile de fond un brin redondante (malgré un fight totalement gratuit avec un aligator) pendant les deux tiers du film qui dépasse joyeusement les deux heures de bobines, une durée qui apparaît trop chargée pour son bien tant elle n'a que peu à dire sur son contexte important, quand elle ne se perd pas dans les méandres d'une écriture furieusement caricaturale - aucune de ces scènes n'est aussi forte que l'image bien réelle dont elles s'inspirent.
Et c'est là où la présence de Fuqua incarne paradoxalement à la fois sa plus grande faiblesse mais aussi et surtout sa plus grande force, tant Emancipation se fait avant tout et surtout un simili-actionner à l'héroïsme austère et à l'appétit vorace pour la violence et un certain sensationnalisme; un vrai B movie où l'esclavage est reléguée à un artifice pour accentuer l'urgence de l'évasion d'un homme que rien ni personne ne peut briser.

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Pris dans ce versant hautement oubliable, embaumé dans la photographie gracieuse de Robert Richardson, Emancipation se fait alors une expérience certes en deçà de ses possibilités mais divertissement, vissé sur un Will Smith dont la physicalité du jeu a rarement été autant mise à l'épreuve.
Cocktail étrange entre la bisserie nihiliste à l'action un brin exagérée et le drame historico-réaliste douteux à la violence hardcore, quelque part entre 12 Years a Slave et The Patriot, le film n'en reste pas moins divertissant dans sa manière de célébrer un héroïsme purement Hollywoodien.
Jonathan Chevrier