De Alice Diop
Avec Kayije Kagame, Guslagie Malanda, Valérie Dréville
Chronique : Froid, clinique, Saint-Omer est un film de procès glaçant. Alice Diop nous place en spectateur neutre, on ne verra ni n’entendra l’accusée ailleurs que dans son box.
Les seuls moments où l’on sort du prétoire c’est pour accompagner une jeune romancière qui suit le procès viscéralement et pour qui l’histoire de Laurence, mère infanticide, résonne étrangement avec la sienne. Modèle de cinéma anti-spectaculaire, Saint-Omer questionne sur les raisons qui peuvent pousser une mère à tuer son enfant. Mais sans jamais promettre d’y répondre.
On assiste aux interrogatoires de Laurence (fascinante Guslagie Malanda), dont le langage châtié, l’élocution parfaite et les liaisons désuètes nous tiennent à distance des émotions. C’est une expérience à la fois étrange et malaisante que de l’écouter raconter son histoire avec cette froideur.
On aurait pu s’attendre à ce que le personnage de Rama, la journaliste, apporte en contre-poids un côté chaleureux et humain, mais c’est en fait tout l’inverse. On comprend une incompréhension violente avec sa propre mère dans des flash-back atones, mais il y a trop d’ellipses pour en saisir vraiment le sens et les connecter avec ce qui se passe au tribunal.
D’autant plus que Diop use et abuse de plans muets longs à l’excès. Émergent cependant des moments de grâce, puissants, comme lorsque le vacarme de l’audience s’estompe pour ne conserver que la respiration de Rama et Laurence et capte leurs regards ou que la caméra saisit les yeux humides de la présidente.
Radical mais excluant.
Synopsis : Rama, jeune romancière, assiste au procès de Laurence Coly à la cour d’assises de Saint-Omer. Cette dernière est accusée d’avoir tué sa fille de quinze mois en l’abandonnant à la marée montante sur une plage du nord de la France. Mais au cours du procès, la parole de l’accusée, l’écoute des témoignages font vaciller les certitudes de Rama et interrogent notre jugement.