L'horloger de Saint-Paul

Par Dukefleed
Tavernier - Noiret - Rochefort: Trio de haute volée

Bertrand Tavernier, l’encyclopédie du cinéma, avec ce premier film, adapte un roman de Simenon ; mais ce polar ne sera que le point de départ d’une histoire s’intéressant plus aux relations père-fils, au contexte politique post 68 qu’à l’enquête elle-même.

Philippe Noiret, dans le rôle de cet horloger au cœur du quartier St-Paul de Lyon, apprend que son fils a abattu le contremaitre apparemment tyrannique de sa petite amie. Tous deux ont ensuite pris la fuite. Crime passionnel d’un fils élevé seul par ce père qui s’aperçoit tardivement méconnaitre et qu’il découvre au fur et à mesure de l’enquête ; ou crime politique post 68 contre un symbole de l’oppression des patrons contre les ouvriers. Le film ne pourrait être que cela ; donc on se pose la question, mais Tavernier décide de la faire éluder par un Noiret plus préoccuper par le lien à son fils. L’enquêteur joué par Rochefort se préoccupe aussi de cette enquête car elle le renvoie lui aussi à sa propre paternité ; début des 70’s, la question de la paternité commence à se poser.

Philippe Noiret est tout aussi touchant que Rochefort en père placide acceptant les événements. Il est aussi à l’image de ce que seront nombre de personnages principaux de Tavernier ; un homme transformé par l’histoire qu’il est en train de vivre.

Et donc là où le film se révèle, c’est bien dans toutes ces petites phrases anodines, car il s’agit d’une chronique de personnage avant tout. Quand Noiret dit à la gouvernante de son fils comme un constat amère, « Tu le connaissais mieux que moi mon garçon » ; la dernière scène en devient autant poignante et riche de sens. Dans un parloir avec un temps très limité de paroles, pourquoi se concentrer sur des histoires du passé sans lien avec le moment présent ; peut-être tout simplement car à travers ces échanges anodins, on apprend à se connaitre.

Et dire que les cinéastes de la Nouvelle Vague, Truffaut en tête, se moqueront ouvertement de ce « cinéma à papa », d’un autre temps ; mais pourtant très inspiré et de l’œuvre d’un jeune cinéaste de 34 ans biberonné aux grands classiques et réalisateurs de renom.

Un film qui en plus de son scénario solide, des acteurs de premier plan, offre une tranche de vie hyper réaliste de la vie populaire des 70’s en contre champ de ce que fera Sautet à la même époque avec la bourgeoisie.

Sorti en 1974

Ma note: 14/20