[CRITIQUE] : Last Dance

Par Fuckcinephiles
Réalisatrice : Coline Abert
Avec : Vinsantos DeFonte
Budget : -
Distributeur : Condor Distribution
Genre : Documentaire.
Nationalité : Français, Américain.
Durée : 1h41min
Synopsis :
À la Nouvelle Orléans, tout le monde connaît Vince, alias Lady Vinsantos, une Drag Queen emblématique qui y a fondé sa propre école. Pour Vince, le Drag est à la fois un art qu'on perfectionne au quotidien et un acte politique qui fait bouger les représentations. Seulement, après 30 ans de carrière, Vince est las de ce personnage qui a pris le contrôle de sa vie. Il décide donc de dire adieu à Lady Vinsantos, non sans avoir réalisé son plus grand rêve : un dernier show à Paris.


Critique :

En partant d'adieux touchants et mélancolique, #LastDance se fait à la fois une réflexion captivante sur ce qu'est être Drag dans l'Amérique d'aujourd'hui mais aussi à travers une introspection intime et puissante, un merveilleux appel à la tolérance et au droit à la différence. pic.twitter.com/1UuaW9WwZX

— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) February 23, 2023

Il y a quelque chose de rassurant dans l'idée que si la population - pas uniquement hexagonale - commence à évoluer sur sa position quant à la question du genre, le septième art lui, à plusieurs temps d'avance qui lui permet si ce n'est de jouer un rôle didactique, au moins de ne pas se laisser aller à la désinformation en donnant scène et parole aux concernés.
Plus où moins exempt des salles tant on ne compte que quelques exemples plutôt récents (l'excellent Trois nuits par semaine de Florent Gouëlou notamment), la culture drag, sans doute un brin aidé par le succès étonnant - mais mérité - de la déclinaison française de l'émission Drag Race, commence lentement mais sûrement à être représenté.
Même s'il s'ouvre de manière lumineuse et pailletée, Last Dance de Coline Abert ne se fait pas tant une plongée dans la lumière de ce monde sophistiqué dans une Nouvelle-Orléans en pleine ébullition, que dans son versant plus sombre et mélancolique, vissée sur les aternoiements existentielles d'une âme lassée, une icone drag queen de la scène underground américaine qui décide de raccrocher les talons, pour de bon.

Copyright Condor Distribution


Soit Vince, alias Lady Vinsantos, une figure emblématique qui y a même fondé sa propre école.
Pour lui, la culture Drag est à la fois un art qu'on perfectionne au quotidien et un acte politique qui fait bouger les représentations, une affirmation pleine et libre de soi.
Mais après trente ans aux côtés d'une Lady Vinsantos qui a sensiblement contrôlé sa vie, Vince n'en peut plus, il est fatigué par sa propre création et même si son entourage ne le sait pas encore, il va lui dire adieu.
Mais si elle doit quitter sa vie, cela doit évidemment se passer sur scène et en grande pompe, et quoi de mieux qu'un ultime spectacle à Paris pour s'offrir le plus mémorable des adieux.
Au travers des préparatifs de cet ultime spectacle dans la capitale, le documentaire se fait le portrait intime et profondément captivant d'un homme fatigué par l'idée de se mettre en scène, trop conscient qu'il est de l'impact à la fois fantastique mais aussi vampirisant que son personnage à eu sur son quotidien mais aussi et surtout sur sa propre identité.
Renoncer à cette vie pourtant si épanouissante, a ce morceau important de son existence - une décennie -, c'est presque comme le ramener à son douloureux passé, des excès artificiels de la drogue à une adolescence difficile confrontée de plein fouet aux ravages de l'exclusion et du Sida.

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D'adieux touchants et mélancolique à tout un monde unit et solidaire autant qu'à tout un pan d'une vie, Last Dance incarne à la fois une réflexion passionnante et humaine sur ce qu'est être Drag dans l'amérique d'aujourd'hui, ce qu'est de porté fièrement toute la complexité d'une figure à la fois politique, idéologique et libératrice; mais aussi et surtout, à travers une introspection intime et puissante, un merveilleux appel à la tolérance et au droit à la différence, dénué de tout cliché et de tout misérabilisme putassier.
Une pépite de documentaire, rien de moins.
Jonathan Chevrier