Nouveau film de la réalisatrice Patricia Mazuy après "Peaux de Vaches" (1989), "Saint-Cyr" (2000), "Basse Normandie" (2004), "Sport de Filles" (2011) et "Paul Sanchez est Revenu !" (2018). La cinéaste avoue une volonté de faire un vrai Film Noir avec ce projet dont elle cite comme référence "Traquenard" (1958) de Nicholas Ray et, plus étonnant, "A Propos des Chansons Paillardes Japonaises" (1967) de Nagisa Oshima sur lequel la cinéaste précise : "Avec la bande des vieux chasseurs qui a privatisé le bowling pour leur dîner annuel, j'ai repensé à un film de Nagisa Oshima de 1967 à propos des chansons paillardes au Japon. Dans le film, l'ancestralité venait des chants eux-mêmes. Dans Bowling Saturne l'ancestralité est incarnée par les images de chasse, mais le souvenir du film d'Oshima m'a donné confiance pour construire le rythme de la scène de ce dîner, pour les temps de suspense et d'adrénaline tandis qu'ils se repaissent de leurs images de chasse." Pour cette histoire la réalisatrice-scénariste retrouve Yves Thomas son scénariste de "Saint-Cyr" (2000) et "Paul Sanchez est Revenu !" (2018). Précisons que le film est produit par Ex Nihilo, société communautaire notamment initiée par Robert Guédiguian avec laquelle il produit ses films mais aussi plus récemment "Les Jeunes Amants" (2022) de Carine Tardieu, puis par la société Les Films du Fleuve des frères Dardennes qui produisent aussi les autres dont "R.M.N." (2022) de Cristian Mungiu. Ce nouveau film de Patricia Mazuy a été interdit au moins de 16 ans. Le film fut plutôt bien reçu par la critique mais malheureusement il n'a pas rencontré son public avec seulement 12400 entrées France...
A la mort de son père, Guillaume, policier ambitieux obtient par héritage un bowling qu'il offre en gérance à son demi-frère Armand, qui jusqu'ici vivait en marginal. Mais l'héritage est maudit et va plonger les deux frères dans un gouffre de violence... Le flic est incarné par Arieh Worthalter vu dans "Girl" (2018) de Lukas Dhont, "A Coeur Battant" (2020) de Keren Ben Rafael ou "Le Parfum Vert" (2022) de Nicolas Pariser, tandis que son demi-frère est interprété par Achille Reggiani qui n'est autre que le fils de Patricia Mazuy et de Simon Reggiani (lui-même fils de Serge Reggiani) qui a collaboré à plusieurs des films de sa conjointe, le jeune acteur avait déjà eu un petit rôle dans "Paul Sanchez est Revenu !" (2018). Citons ensuite Leïla Muse aperçue dans "Pupille" (2018) de Jeanne Herry ou "L'Evénement" (2021) de Audrey Diwan, Olivier Faliez aperçu dans "Grâce à Dieu" (2019) de François Ozon, "A Plein Temps" (2022) de Eric Gravel et "Le Sixième Enfant" (2022) de Léopold Legrand, Emmanuel Matte aperçu dans "Saint-Laurent" (2014) de Bertrand Bonello et "Un Peuple et son Roi" (2018) de Pierre Schoeller, Frédéric Van Den Driessche vu dans "Germinal" (1993) de Claude Berri, "Le Poulpe" (1998) de Guillaume Nicloux ou "Les Anges Exterminateurs" (2006) de Jean-Claude Brisseau, puis enfin Vinciane Millereau vue dans "Les Traducteurs" (2019) de Régis Roinsard et "La Très Très Grande Classe" (2022) de Frédéric Quiring... Quand on regarde la bande-annonce et qu'on lit la speech on ne s'attend pas forcément à voir un tel récit qui, sur le fond est assez basiques, mais sur la forme qui surprend et impose un style et une ambiance. C'est le gros point fort du film. Un climax aussi tendu que malsain s'installe, façon plongée dans les bas-fonds d'une petite cité, avec une symbolique soignée avec présence du rouge sang, l'entrée ou le tunnel comme les bouches de l'enfer. Tout nous plonge dans un thriller forcément dark et mystérieux tant on attend le ou les twist(s).
Les décors sont tout aussi symbolique, avec l'appartement qui porte le deuil, l'omniprésence de la mort via les chasseurs présentés comme une secte. Malheureusement, on tique très vite sur plusieurs points, le scénario va vite s'avérer bancal. D'abord le début du film installe l'atmosphère du film mais sans rien raconter de franchement intéressant. Il ne se passe donc rien avant une scène choc, violente et difficile qui soudain dévoile beaucoup d'informations en quelques instants et par là même arase une partie d'un suspense éventuel. Mais surtout le début du récit est d'ores et déjà peu compréhensible, car comment croire que le frère aîné policier offrirait la gérance d'un bowling (comme si ça se faisait comme ça ?!) à un demi-frère qui le déteste et qu'il connaît à peine ?!... ATTENTION SPOILERS !... Idem, la séquestration au début n'est pas crédible une seconde autant dans le déroulement que pour les conséquences, et toute la partie chasse/ chasseurs qui tient juste du paramètre gratuit et démago pour une idéologie aux gros sabots, un tueur bourrin et peu discret mais qui s'en sort facilement, une bavure qui passe crème (le suicide de la jeune femme)... FIN SPOILERS !... Beaucoup trop d'incohérences et de maladresses donc pour un récit pourtant assez linéaire et classique. Clairement la réalisatrice s'est focalisé sur sa mise en scène, sur l'esthétique et le climax, dommage qu'elle en est oublié son histoire, sa vraisemblance (à minima au moins !) et son évolution. Un film au potentiel certain mais trop inabouti pour convaincre.
Note :
10/20