De Jeanne Herry
Avec Adèle Exarchopoulos, Dali Benssalah, Leïla Bekhti, Miou-Miou, Gilles Lelouche, Suliane Ibrahim
Chronique : Après Pupille, drame bouleversant sur la parentalité, Jeanne Herry s’intéresse dans son nouveau film à la justice restaurative, un procédé qui permet de mettre en contact victimes et délinquants et d’amorcer un dialogue qui doit aider les premières à surmonter leurs traumas et les seconds à prendre conscience des conséquences de leurs actes.
D’une finesse d’écriture exceptionnelle, Je verrai Toujours vos Visages atteint une justesse quasi documentaire. Malgré le quasi-huis-clos imposé par son sujet, le film trouve son rythme et son dynamisme dans les émotions qui parcourent les visages et les liens qui se tissent entre les personnages. Il ne souffre d’aucun temps mort ni faible, et fait preuve d’une remarquable fluidité narrative. Malgré la dureté des histoires, malgré la détresse des victimes, Herry parvient à imposer des moments de respirations, parfois drôles ou tendres, toujours vrais. Elle ne craint pas de prendre son temps, d’installer des silences pour mieux faire émerger les mots, mieux faire exister la parole, tout ce qui est au cœur du film et du processus. La véracité des témoignages et des confrontations est sidérante, renforçant le message central du film, la nécessité du dialogue pour faire société. Sans angélisme, en repoussant le pathos tant que possible, mais avec optimisme et espoir, Je verrai Toujours vos Visages met en exergue la résilience et la possibilité, si ce n’est de pardon, de réparation.
Au-delà de la réalisation toute en maitrise de Herry, si le film fonctionne si bien, si on croit tant à chacune des scènes qui s’offre à nous, c’est aussi et surtout grâce à la densité et à l’homogénéité extraordinaire du casting. Une seule fausse note pourrait briser l’authenticité générale du long métrage, mais tous les acteurs font preuve d’une interprétation à fleur de peau, d’un naturel magistral. Difficile de faire ressortir des performances en particulier, mais Suliane Ibrahim (fulgurante découverte de La Nuée l’année dernière), Adèle Exarchopoulos ou Gilles Lelouche impressionnent particulièrement.
Cette troupe de comédiens exceptionnels compose le cœur vibrant de Je Verrai toujours vos Visages, film choral d’une qualité rare et grosse bouffée d’humanité.
Synopsis : Depuis 2014, en France, la Justice Restaurative propose à des personnes victimes et auteurs d’infraction de dialoguer dans des dispositifs sécurisés, encadrés par des professionnels et des bénévoles comme Judith, Fanny ou Michel.
Nassim, Issa, et Thomas, condamnés pour vols avec violence, Grégoire, Nawelle et Sabine, victimes de homejacking, de braquages et de vol à l’arraché, mais aussi Chloé, victime de viols incestueux, s’engagent tous dans des mesures de Justice Restaurative.
Sur leur parcours, il y a de la colère et de l’espoir, des silences et des mots, des alliances et des déchirements, des prises de conscience et de la confiance retrouvée… Et au bout du chemin, parfois, la réparation…