Les Trois Mousquetaires : D'Artagnan (2023) de Martin Bourboulon

Par Seleniecinema @SelenieCinema

Enième et nouvelle adaptation des célèbres aventures contées dans le roman "Les Trois Mousquetaires" (1844) de Alexandre Dumas, qui a déjà connu près d'une quarantaine d'adaptations cinéma (imaginez avec les télévisuelles !) de "Les Mousquetaires de la Reine" (1903) de Georges Méliès au film russe "Les Trois Mousquetaires" (2013) de Sergueï Jigounov en passant par le hollywoodien "Les Trois Mousquetaires" (1948) de George Sidney, surtout les français avec "Les Trois Mousquetaires" (1953) de André Hunebelle et déjà la version deux parties (1961) de Bernard Borderie, sans compter la trilogie éponyme (1973-1974-1989) de Richard Lester. Ce nouveau projet a été lancé par la volonté du producteur Dimitri Rassam et de Jérôme Seydoux du groupe Pathé, qui voulait relancer l'intérêt autour du patrimoine littéraire français qui avait déjà fait les grandes heures du cinéma hexagonal. Assez logiquement, Dimitri Rassam a proposé le projet à des cinéastes qu'il connaît bien, on retrouve donc à la réalisation Martin Bourboulon qui a signé récemment "Eiffel" (2021), puis au scénario le duo Alexandre de La Patellière et Mathieu Delaporte, réalisateurs des succès "Le Prénom" (2012) et "Le Meilleur reste à Venir" (2019), et surtout ils avaient déjà écrit le dyptique "Papa ou Maman" (2015-2016) de Martin Bourboulon, le trio se reforme donc pour l'un des deux films les plus attendus de l'année, en attendant la suite "Les Trois Mousquetaires : Milady" (2023) attendu pour décembre 2023. En effet, vu l'ampleur le film a été scindé assez logiquement en deux parties, mais tout a été tourné en simultané durant 8 mois de tournage pour un budget important (pour un film français) de 72 millions d'euros soit un peu plus que le "Astérix et Obélix : l'Empire du Milieu" (2023) de Guillaume Canet. Notons que l'envie littéraire ne s'arrête pas là puisqu'il a déjà été annoncé l'adaptation d'un autre roman d'Alexandre Dumas, "Le Comte de Monte-Cristo" qui sera assumé à la réalisation comme à l'écriture par le duo La Patellière-Delaporte... Un jeune nobliau gascon monte à Paris dans l'espoir de devenir mousquetaire du roi comme l'était son père. Mais l'arrivée à Paris ne se fait pas en encombre mais devient finalement ami avec trois fameux mousquetaires. Très vite le jeune d'Artagnan va être plonger dans les affres de l'Histoire du Louvres au Palais de Buckingham tandis que le pays est gangréné par les conflits entre religion et qu'une guerre avec l'Angleterre semble imminente... 

D'Artagnan est incarné par François Civil, qui retrouve deux de ses amis mousquetaires, après "En Corps" (2022) de Cédric Klapisch il retrouve Pio Marmaï alias Porthos, puis après "Molière" (2007) de Laurent Tirard il retrouve Romain Duris alias Aramis, ce dernier retrouve son réalisateur de "Eiffel" et retrouve après les films "Dobermann" (1997) de Jan Kounen et "Fleuve Noir" (2018) de Erick Zonca l'acteur Vincent Cassel alias Athos qui vu dans l'autre événement de l'année avec "Astérix et Obélix : l'Empire du Milieu" (2023). Les deux belles du film sont jouées par Lyna Khoudri alias Constance Bonnacieux vue récemment dans "Novembre" (2022) de Cédric Jimenez et "Houria" (2023) de Mounia Meddour, puis par Eva Green vue récemment dans "The Nocebo Effect" (2022) de Lorcan Finnegan (inédit en France), qui retrouve Romain Duris après "Arsène Lupin" (2004) de Jean-Paul Salomé et qui a depuis déserté le cinéma français pour une carrière internationale à l'exception notable jusqu'ici de "Proxima" (2019) de Alice Winocour. Citons ensuite Louis Garrel alias Louis XIII vu récemment dans "L'Envol" (2023) de Pietro Marcello  et surtout tout juste césarisé du meilleur scénario pour son film "L'Innocent" (2022), Vicky Krieps alias la Reine Anne d'Autriche vue tout récemment dans le rôle d'une autre reine d'envergure dans "Corsage" (2023) de Marie Kreutzer, n'oublions pas le britannique Jacob Fortune-Lloyd alias Duc de Buckingham abonné aux personnages en costume depuis les séries TV "Dans l'Ombre des Tudor" (2015) et "Les Médicis" (2018) et au cinéma aperçu dans "Coup de Théâtre" (2022) de Tom George. Citons ensuite les acteurs Marc Barbé en Tréville vu dernièrement dans "Le Temps des Secrets" (2022) de Christophe Barratier, Eric Ruf en Richelieu vu dans "J'Accuse" (2019) de Roman Polanski ou "La Ligne" (2022) de Ursula Meier, puis encore Ralph Amassou vu dans la saga de "Les Tuche" (2011-2021) de Olivier Baroux, Patrick Mille vu dans un seul film ces 5 dernières années avec "Belle Fille" (2020) de Méliane Marcaggi, Dominique Valadié vue tout récemment dans "La Grande Magie" (2023) de et avec Noémie Lvovksy, Alexis Michalik dont on se rappelle son excellent film "Edmond" (2019) qui retrouve François Civil après "Le Chant du Loup" (2019) de Antonin Baudry, Julien Frison qui retrouve lui Pio Marmaï après "L'Evénement" (2021) de Audrey Diwan, et qui retrouve après "La Nuit du 12" (2022) de Dominik Moll sa partenaire Camille Rutherford vue dans "After Blue (Paradis Sale)" (2021) de Bertrand Mandico... Le film débute fort comme pour signifier que le film va laisser place à l'action, façon western à la française avec le cavalier qui traverse la plaine, les "longs manteaux" à la Leone, la calèche (oups la diligence !). Dès l'arrivée à Paris de d'Artagnan tout se bouscule, le travail dantesque sur les décors et les costumes ancrés dans un réalisme teinté de modernité, ainsi que l'effervescence d'une cité en pleine ébullition, la plongée dans le Paris de Richelieu est parfaitement réussie. Tout le long du film on est invité dans des lieux magnifiques et empreint d'Histoire du Louvre aux châteaux de Chantilly ou Fontainebleau en passant par la Cathédrale de Meaux ou les Invalides. Mais on remarque aussi tous les détails qui font que cette version veut s'émanciper des précédentes versions et rappeler que cela faisait 60 ans que le roman n'avait pas connu une adaptation nationale.

60 années que le réalisateur veut assumer, et donc on s'amuse à relever tous les détails qui changent, fidèle ou non aux films précédents et/ou du roman original. Pêle-mêle... ATTENTION SPOILER !... D'Artagnan n'a plus de canasson, il n'y a plus de valets, Constance n'est plus une épouse ou nièce mais une femme entrepreneuse et indépendante, et surtout Athos se retrouve bisexuel ! Ce qui est en soi complètement faux et irrespecteux vis à vis de l'oeuvre originelle mais peut passer car c'est court à l'écran et passe surtout via la dimension orgiaque de son mode de vie... FIN SPOILER !... Des modifications qui ne manqueront pas de faire parler mais qui reste plutôt bien intégré au récit et rappelons que tous les films précédents avaient également effectué leurs petites singularités. Par contre d'autres points sont plus gênants, par exemple une Constance qui serait semble-t-il aussi infirmière de talent voir même médecin, ou ce choix de la caméra à l'épaule lors du premier duel groupé dans la forêt qui offre une immersion dans la mêlée mais empêche aussi toute fluidité et toute lisibilité du combat. Rappelons que c'est une fiction, et que si on sait depuis longtemps que Richelieu n'était pas le Diable et que La Rochelle était bien avant l'arrivée de D'Artagnan Dumas avait su rendre son aventure cohérente. Le film pousse pourtant encore le curseur avec une séquence originale et inédite doublement fictive lors du mariage. Niveau jeu, le casting est impeccable, le quator fonctionne à merveille, la romance est touchante bien qu'un peu mièvre la faute à des minauderies qui ne vont pas avec (justement) la modernité de Constance, le face à face Richelieu/Ruf et Tréville/Barbé est solide au point qu'on aimerait même un peu plus, le Roi/Garrel joue sa carte même si on aimerait un Roi peut-être moins benêt, mais on savourera surtout Milady/Green vénéneuse à souhait. Martin Bourboulon signe une nouvelle adaptation réussie et efficace, moderne surtout même si à force de chercher la modernité à tout prix il prend parfois le risque de se perdre dans de l'esbroufe. En tous cas, ce film est un joli retour au grand film populaire, du Cape et d'Epée à la française qui démontre qu'on peut encore offrir du romanesque et de l'action et du grand spectacle. Un très bon moment.

Note :  

14/20