Nouveau film de la réalisatrice coréenne July Jung après son premier long très réussi avec "A Girl at my Door" (2014). Des années ont passé pour trouver son nouveau sujet, qu'elle a découvert tard malgré que ce soit une affaire qui a fait couler beaucoup d'encre dans son pays. En 2016, une lycéenne s'est suicidée alors qu'elle était en stage scolaire au sein d'un centre d'appel. Alors que la société a tenté d'étouffer l'accident, une enquête a permis de révéler des conditions de travail dégradantes et violentes. Une affaire qui a renvoyé une image peu reluisante à la société sud-coréenne. La réalisatrice-scénariste s'est alors documentée sur cette affaire pour écrire son film...
Dans le cadre de son cursus scolaire, la lycéenne Kim Sohee a trouvé un travail dans un centre d'appel d'un opérateur téléphonique. Mais elle comprend très vite que la pression est immense pour que chacun atteigne les objectifs. Petit à petit la lycéenne perd le moral et psychologiquement elle décline mais ne peut réagir au risque d'être sanctionnée au niveau scolaire. La lycéenne va définitivement perdre pied. La police ouvre une enquête, l'inspectrice Yoo-Jin est en charge de l'enquête. La policière va particulièrement s'impliquer quand elle va apprendre qu'un premier drame avait été caché par l'entreprise... La lycéenne Kim Sohee est incarnée par Kim Si-Eun, aperçue dans "Mademoiselle" (2016) de park Chan-Wook, vue depuis notamment dans "Boys Be !" (2020) de Yoon Min-Sik. La policière est jouée par Bae Doona qui retrouve sa réalisatrice de "A Girl at my Door" (2014) pour un second rôle de policière, rappelons surtout que l'actrice est une star vue notamment dans "Sympathy for Mister Vengeance" (2002) de park Chan-Wook, "The Host" (2006) de Bong Joon-Ho, "Cloud Atlas" (2012) et "Jupiter : le Destin de l'Univers" (2015) tous deux des Wachowski ou plus récemment dans "Les Bonnes Etoiles" (2022) de Hirokazu Kore-Eda. Citons aussi l'acteur Choi Hee-Jin vu dans "Lady Vangeance" (2005), "Je suis un Cyborg" (2007) ou "Thirst, Ceci est mon Sang" (2009) tous de Park Chan-Wook, puis enfin Song Yo-Sep vu dans "The Chaser" (2008) de Na Hong-Jin, "Paju" (2009) de Park Chan-Ok, "Doenjang" (2010) de Lee Suh-Goon ou "The Roundup" (2022) de Lee sang-Yong... Le film débute avec la jeune Kim So-hee, ado normale de 16-17 ans qui danse, s'amuse avec sa meilleure amie, puis tente de travailler du mieux qu'elle peut à l'école jusqu'à accepter un stage professionnel qui ne lui convient pas du tout. Pour finir aussitôt avec un détail, disons que le paramètre danse est une partie bâclée, car si elle semble anecdotique elle ne l'est semble-t-il pas pour la cinéaste qui sème son récit de séquences de danse, et qui martèle que la jeune ado est talentueuse alors même que les chorégraphies ne sont pas plus dignes qu'une fillette amatrice dans son salon. Mais est-ce simplement un détail insignifiant, peut-être...
Le film décrypte avec finesse et application le déroulement systémique du harcèlement moral et psychologique des supérieurs, la pression des chiffres de tous les instants qui mettent les stagiaires sous pression, qui démontre avec minutie les raisons qui amènent à favoriser un stagiaire plutôt qu'un titulaire... etc... La réalisatrice s'applique à raconter ces tortures psychiques de façon méticuleuse qui finissent par faire froid dans le dos tant la société semble déshumanisée. Mais toute cette partie dure un peu longue (au moins une heure) alors que certaines parties ne sont pas bien plaisantes (danse) et surtout nous sommes issus aussi du monde du travail, 30 mn auraient suffit à passer le message et le fond du propos. Le tournant arrive avec le drame attendu, tragique et déchirant. L'enquêtrice en deuil s'avère alors plus disposée à réagir face à des indices concordants. On constate alors que le film évite l'écueil des éventuels ripoux ou des supérieurs obtus, ou du moins l'officier de police reste maître de son enquête malgré les pressions. Mais ce qui est passionnant ce sont les indices, aussi minces soient-ils qui font au final un dossier solide, comme des gouttes d'eau qu'il ne faut jamais négliger, chaque gouttes étant nécessaires à la montée des eaux. L'abnégation de la policière n'a d'égal que la détresse des proches qui n'ont pas su déceler le naufrage psychologique de Kim So-Hee. Certaines séquences sont particulièrement émouvantes. Au final la réalisatrice signe un portrait terrifiant de la société sud-coréenne, dragon d'Asie qui à créer une société d'esclaves au service de l'argent roi, un regard lucide sur une société qu'on pourrait qualifier de hyper capitaliste. Dommage que le film soit si long, si étiré (on aurait pu gagner aisément 25-30mn) mais le film reste prenant, touchant et nécessaire comme piqûre de rappel. A conseiller.
Note :
14/20