[CRITIQUE] : Alma Viva

Par Fuckcinephiles
Réalisatrice : Cristèle Alves Meira
Avec : Lua Michel, Ana Padrão, Jacqueline Corado,...
Budget : -
Distributeur : Tandem
Genre : Drame.
Nationalité : Portugais, Français.
Durée : 1h28min
Synopsis :
Comme chaque été, la petite Salomé retrouve le village familial, niché au creux des montagnes portugaises, le temps des vacances. Tandis que celles-ci commencent dans l’insouciance, sa grand-mère adorée meurt subitement. Alors que les adultes se déchirent au sujet des obsèques, Salomé est hantée par l’esprit de celle que l'on considérait comme une sorcière.


Critique :

Drame à la fois un brin inconfortable et drôle sur les relations brisées entre les membres d'une famille dysfonctionnelle, et récit d'émancipation cathartique d'une gamine voguant vers l'âge adulte, #AlmaViva se fait un premier film aussi dense et captivant que subtilement enragé pic.twitter.com/vzu3kyrG16

— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) April 9, 2023

Dès ses premières séquences, Alma Viva a tout d'un simple drame familial estival sous fond de deuil, tiraillé entre tradition et de modernité et dont le cadre est flanqué au coeur d'un village de montagne portugais isolé.
Une chronique capturee à travers les yeux de Salomé, une pré-adolescente déchirée entre deux mondes : la culture folklorique et presque magique de la maison de sa grand-mère bien-aimée, et une sorte de matérialisme dénué de toute sentimentalité qui a conduit les siens a quitté cette région pauvre - Trás-os-Montes - du Portugal pour émigrer en France, là où Salomé elle-même a grandi.
Mais lentement mais sûrement, le premier long-métrage de la réalisatrice franco-portugaise Cristele Alves Meira, se matérialise en une fantastique et mélancolique histoire de fantôme, une possession spirituelle se faisant comme une étape vers l'émancipation féminine d'une gamine devenant sans le vouloir, la messagère pleine de sagesse de sa défunte grand-mère pour mettre de l'ordre dans sa famille - mais pas que.

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Tout en délicatesse, soucieuse de garder son pendant surnaturel fermement ancrée dans un réalisme d'observation, la cinéaste, pas si éloigné du cinéma tendrement décalé et naturaliste de Alice Rohrwacher, nous emporte dans les limbes entre le terrestre et le spirituel, le préjugé et la superstition, la forme et l'abstraction, le réel et le surnaturel, constamment vissé sur le parcours émancipateur et cathartique d'une jeune fille qui cristallise à la fois le bien et le mal de notre fascination pour la culture folklorique.
Alors que la sorcellerie, où la menace de celle-ci, apporte une sorte de pouvoir, les ressentiments et les tensions familiales vont bouillonner avec ou sans son aide, articulées autour de ceux qui ont toujours été là, et ceux qui ont émigrés et reviennent alors que la nature elle suit toujours son cours, parfois bousculée par la négligence humaine.
À la fois pur drame inconfortable et drôle sur les relations brisées entre les membres d'une famille dysfonctionnelle (où le deuil est une porte vers un nouveau départ), et émouvant récit d'initiation/émancipation cathartique d'une jeune fille entrant avec innocence dans l'âge adulte, Alma Viva se fait un premier effort aussi étonnamment dense et captivant que subtilement enragé.
Une (très) belle surprise.

Jonathan Chevrier