Une Histoire d'Amour (2023) de Alexis Michalik

Dramaturge et metteur en scène reconnu et prolifique dans le milieu du théâtre avec déjà 5 Molières, Alexis Michalik revient au cinéma après avoir déjà adapté une de ses pièces avec l'excellent "Edmond" (2019). Cette fois il porte à l'écran une pièce d'un tout autre genre avec "Une Histoire d'Amour" (2020), et avec un choix qui le distingue aussi de son premier film, à savoir qu'il a choisi les mêmes acteurs qui assument donc le passage des planches à l'écran. Le cinéaste précise : "A théâtre on raconte, au cinéma, on montre. Le théâtre est un art où la parole est au centre de tout, où les acteurs racontent une histoire ; au cinéma, c'est la caméra qui filme une histoire. Il y a mille différences entre les deux arts, mais aussi des similarités. Au cinéma, leprocessus va être plus morcelé, avec une grande quantité de décors... Mais mon écriture théâtrale est déjà très cinématographique. Pour Une Histoire d'Amour, j'ai essayé de creuser des pistes que je n'ai pas pu approfondir au théâtre : utiliser plus de décors, suivre une chronologie un peu différente, garder l'essentiel en le racontant de façon légèrement différente. Au théâtre par exemple, deux personnes qui discutent cinq minutes, ça va vite, alors qu'au cinéma, ça semble une longue scène de dialogues. Le rapport aux dialogues n'est pas le même." Le réalisateur-scénariste a signé une première version de 01h47, mais qui a été descendue ensuite à "seulement" 01h26, soit la durée exacte de la pièce ce qui n'ait a priori nullement prémédité... 

Une Histoire d'Amour (2023) de Alexis Michalik

Katia et Justine tombent amoureuses. Elles décident de faire une enfant laissant le hasard décider qui le portera. Mais quand Katia tombe enceinte, Justine la quitte soudainement sans explication. 12 ans plus tard, Justine a une vie rangée tandis que Katia a gardé son enfant. Mais Katia a apprend qu'elle a une maladie incurable, elle doit donc trouver un tuteur pour sa fille. Finalement elle se tourne vers William, son frère écrivain cynique et désabusé... Ce dernier est joué par le cinéaste lui-même, Alexis Michalik vu sur grand écran chez les autres comme dans "Le Chant du Loup" (2019) de Antonin Baudry, "10 Jours sans Maman" (2020) de Ludovic Bernard ou "Une Sirène à Paris" (2020) de Mathias Malzieu. Sa soeur Katia est interprétée par Juliette Delacroix, essentiellement vue au théâtre et à la télévision, aperçue néanmoins dans "Comment je suis devenu un Super-Héros" (1967) de Douglas Attal, Justine est incarnée par Marie-Castille Soyer aperçue dans "Les Etoiles Restantes" (2016) et "Les Lendemains de Veille" (2022) tous deux de Loïc Paillard. Citons encore Pauline Bression vue dans "MILF" (2018) de et avec Axelle Lafont mais surtout populaire dans la série TV "Plus Belle la Vie" (2014-2022), Léontine D'Oncieu de la Batie aperçue dans "Les Cyclades", Daniel Njo Lobé vu notamment dans "A l'Aveugle" (2012) de Xavier Palud ou "A tous les Vents du Ciel" (2016) de Christophe Lioud, Charles Lelaure déjà dirigé par Michalik au théâtre, vu au cinéma dans "Maman a Tort" (2016) de Marc Fitoussi, puis enfin n'oublions pas la jeune Manon Maindivide aperçue dans  "Irréductible" (2022) de et avec Jérôme Commandeur... Le film débute par un prologue qui est tel qu'on s'attend à une fin qui fera la boucle ou qui annonce un twist, mais finalement il va s'avérer plus superflu qu'autre chose, la suite du récit aurait dû se suffire à lui-même. Le film est scindé en deux parties, une première avec une histoire d'amour lesbien où la passion précède le bonheur à la fois touchant et amusant. Une partie joyeuse qui nous dessine un sourire béat jusqu'à cette événement qui va créer la césure narrative. Soudain une ellipse importante pour arriver à des drames déchirants. L'ambiance change avec des personnages qui ont évolué de façon radicale.

Une Histoire d'Amour (2023) de Alexis Michalik

Ajoutons aussi une enfant qui a bien grandi et une partie qui ose un virage presque onirique. Etonnament, c'est la partie du film la plus dense et la plus forte émotionnellement mais c'est aussi celle qui est la plus bancale, la faute à des choix narratifs ou de mise en scène pas toujours judicieux. D'abord on a bien du mal à croire que l'enfant a seulement 12 ans, autant physiquement (la comédienne a environ 20 ans !) que spirituellement (il y a des limites ou alors fallait une incidence dans l'histoire plus essentielle). Sinon, alors que le drame s'ajoute au drame, que les émotions sont déjà à fleur de peau, le cinéaste abuse du larmoyant avec entre autre ce passage où se succède des plans multiples sur un couple qui s'embrasse issus du passé pour bien faire pleurer le spectateur, au cas où. Un système très et trop pathos alors même que l'histoire en a pas besoin, ce côté "forcé" gâche un peu l'émotion qui était de toute façon déjà bien présente. Notons aussi l'ultime phrase du médecin crée un "faux" suspense grossier. Dommage... D'autant plus que paradoxalement ce film fait beaucoup plus théâtral que son précédent film "Edmond" (2019) dont le sujet était justement le théâtre. Mais il faut avouer que Alexis Michalik sait raconter des histoires. L'histoire d'amour lesbien nous fait passer par tous les sentiments, celle du frère offre une dimension onirique inspirée et particulièrement émouvante, les personnages sont à la fois touchants et si humains et donc imparfaits ce qui donne forcément un miroir aux spectateurs. Au final, le film est semé de maladresses, mais la sincérité du propos, l'authenticité des personnages, les quelques bonnes idées (une séparation même avec amour, le "fantôme) font que le film nous touche, entre larmes et sourires. Un bon moment. Note indulgente.

Note :                 

Histoire d'Amour (2023) Alexis MichalikHistoire d'Amour (2023) Alexis Michalik

14/20