Chien de la Casse (2023) de Jean-Baptiste Durand

Par Seleniecinema @SelenieCinema

Après quatre courts métrages avec "Il venait de Roumanie" (2014), "Piano Panier" (2018), "Le Bal" (2019) et "Vrai Gars" (2021) Jean-Baptiste Durand se lance avec son premier long métrage en s'inspirant de son enfance dans un village du sud de la France : "Plus tard, quand j'ai commencé à faire des films, il m'a semblé tout naturel de raconter l'histoire de jeunes péri-urbains qui traînent ensemble, écoutent de la musique, jouent au ballon, boivent de l'alcool, fument du shit, se battent, et n'ont pour refaire le monde qu'un banc ou un terrain de foot. Mes premiers courts métrages évoquent donc cette jeunesse-là et étudient ces rapports très particuliers que le village fabrique entre les jeunes : une sorte de fraternité, d'appartenance à un clan, à la fois forte et violente, avec un rapport très fort à la fidélité. Il venait de Roumanie, mon premier court est quasiment devenu une note d'intention de mon premier long..." Le réalisateur-scénariste co-écrit son film avec Nicolas Fleureau scénariste entre autre du film "Corporate" (2017) de Nicolas Silhol et Emma Benestan qui vient de signer également son premier long avec "Fragile" (2021). En ce qui concerne le titre, le cinéaste explique que c'est une expression des banlieues, une métaphore sur l'amitié qui peut être comme la relation maître-chien avec l'effet bande qui accentue le rapport de domination, tout en ayant l'amour, le courage et la fidélité : "Et le chien de la casse, c'est celui qui fait les choses pour lui, malgré ses amis. Considèrent chacun que l'autre est un chien de la casse." précise le réalisateur... 

Dog et Mirales sont amis d'enfance et vivent depuis toujours dans un petit village du sud de la France. Ils passent leurs journées à traîner et avec le temps Mirales a pris l'habitude de taquiner Dog souvent plus que de raison. Mais quand Dog tombe amoureux de Elsa, Mirales malade de jalousie va devoir grandir pour son bien et pour sauver son amitié avec Dog... Dog est incarné par Anthony Bajon vu ces derniers mois dans "Une Jeune Fille qui va Bien" (2022) de Sandrine Kiberlain, "Un Autre Monde" (2022) de Stephane Brizé et "Athena" (2022) de Romain Gavras, tandis que Mirales est incarné par Raphaël Quenard qu'il retrouve après "La Troisième Guerre" (2021) de Giovanni Aloi ; alors que Anthony Bajon est depuis longtemps déjà un jeune acteur reconnu, Raphaël Quenard se fait un nom qui pousse petit à petit avec de petits rôles dans "Les Olympiades" (2021) de Jacques Audiard, "Mandibules" (2021) et "Fumer fait Tousser" (2022) tous deux de Quentin Dupieux, ou perdu dans de gros casting comme "Novembre" (2022) de Cédric Jimenez et "Coupez !" (2022) de Michel Hazanavicius jusqu'à ce petit rôle mais marquant dans le tout récent "Je verrai Toujours vos Visages" (2023) de Jeanne Herry. La fille par qui tout arrive est jouée par Galatea Bellugi vue dans "Réparer les Vivants" (2016) de Katell Quillévéré, "Une Jeunesse Dorée" (2019) de Eva ionesco ou "Tralala" (2021) des frères Larrieu... Dans sa première partie on a un peu de mal à s'attacher à ces individus, qu'on pourrait aisément qualifier de "cassos" ou même de parasites. Un Mirales/ Quenard dealer, qui joue le caïd qui sait tout et impose donc son omniprésence et sa parole à en devenir aussi antipathique qu'insupportable, cassant et vampirisant son meilleur ami, Dog/Bajon aussi mutique qu'effacé qui se résume à un gamer qui a tout de la victime.

On a bien du mal à croire en cette amitié où il n'y a ni échange ni partage à quelque niveau que ce soit, dont on ne perçoit pas grande chose de bien, ou si peu que ça reste anecdotique comparé à ce qui les rend inintéressant. Il y a pourtant plusieurs autres détails qui ne fonctionnent pas, par exemple la jeune femme qui se dit titulaire d'un master spécialisé n'est carrément pas crédible (façon de parler, de se tenir...), où comment croire que la bande ne connaît pas Dog alors qu'ils connaissent les autres, que Dog est dans cette petite ville depuis des années ?! Heureusement le réalisateur-scénariste a su faire évoluer son duo de façon judicieuse et cohérente avec espoir ce qui n'était pas gagné vu les loustics. La mise en scène est justement inspirée, suivant logiquement les deux amis vers un autre horizon. Ainsi, la caméra est statique dans sa première partie, symbolisant l'ancrage des deux amis dans ce village comme pour montrer qu'ils sont bien là, dans leur inertie. Avec en prime un paramètre "meilleur ami de l'homme" touchant et qui offre un parallèle qui n'est pas anodin. Puis petit à petit, surtout dans sa dernière partie, la caméra va se faire plus mobile comme pour aller vers plus de liberté et d'ouverture sur le monde. L'évolution du récit et des personnages permet au film de surnager, les personnages restent au départ trop inintéressants (pour être "respectueux") pour qu'on s'y attache même si la dernière partie permet de sauver cette amitié de justesse. Un film mi-figue mi-raison, qu'on aurait vraiment voulu aimer. Encore dommage...

Note :                 

10/20