[CRITIQUE] : Dirty difficult dangerous

[CRITIQUE] : Dirty difficult dangerous

Réalisateur : Wissam Charaf

Avec : Clara CouturetZiad Jallad,Darina Al Joundi,…
Distributeur : JHR Films
Budget : -
Genre : Drame.
Nationalité : Français, Libanais, Italien, Qatari.
Durée : 1h23min
Synopsis :
Ahmed, réfugié syrien espérait trouver l’amour en Mehdia, une femme de ménage éthiopienne. Mais à Beyrouth, cela semble impossible... Ce couple de réfugiés sentimentaux réussira-t-il à trouver sa voie vers la liberté alors qu'Ahmed, survivant de la guerre en Syrie, semble rongé par un mal mystérieux qui transforme son corps peu à peu en métal ?

Critique :

Sorte de songe fantastico-absurde pas si éloigné des cinémas de Aki Kaurismäki et Jim Jarmusch, #DirtyDifficultDangerous se fait une fable à la fois allégorique et cruelle dans sa manière de scruter la violence qui caractérise le sort des migrants dans une Beyrouth en crise. pic.twitter.com/7k6TeVrApT

— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) April 27, 2023

Depuis ses premiers courts métrages, le cinéaste franco-libanais Wissam Charaf a forgé son cinéma autour d'une radiographie réelle et rugueuse du Beyrouth contemporain, un regard juste et finalement tout aussi troublée qu'une Liban jamais vraiment tranquille, bousculée par un conflit israélo-palestinien qui n'a de cesse de la déchirer.
Mais il n'avait sans doute jamais été aussi dur (réaliste ?) que pour son second effort, Dirty Difficult Dangerous, sorte de cocktail détonnant entre le drame social sous fond d'immigration, le conte de fée sombre et la comédie romantique désenchantée - voire même un poil grotesque -, vissé sur l'histoire d'amour entre deux jeunes marginalisés.
Soit Ahmed, un réfugié syrien, et Mehdia, une immigrée éthiopienne qui travaille comme femme de ménage.
Les deux vivent un amour secret fait de baisers furtifs dans les rues de les rues d'une Beyrouth qui n'a pour eux rien d'une terre d'accueil accueillante.
Alors que Mehdia tente de s'affranchir de ses employeurs, Ahmed lui, atteint d'une mystérieuse maladie, gagne sa vie en vendant des métaux recyclés.

[CRITIQUE] : Dirty difficult dangerous

Copyright JHR Films


Il y a d'ailleurs quelque chose de profondément fantaisiste - mais pas moins déchirant - dans le fait que le métal qu'il vend commence à l'envahir physiquement depuis qu'il a été touché par une bombe en Syrie, bombe qui lui a laissé des plaies encore ouvertes et une propension à absorber les déchets métallurgiques plus qu'à les expulser.
Les deux amants le savent mieux que quiconque que leur histoire n'a pas d'avenir, mais ils n'ont finalement rien à perdre à tenter de vivre une vie meilleure à deux...
S'éloignant volontairement de la tendance néo-réaliste pour aller puiser sa vérité dans une réalité bien plus complexe qu'elle n'en a l'air, dans une sorte de songe fantastico-absurde presque tout droit sorti des cinémas de Kaurismäki et Jarmusch tant il est saupoudré d'un subtil humour noir mais également d'une utilisation presque jazzy de la musique moyen-orientale (sans oublier une structure épisodique); Charaf fait de Dirty Difficult Dangerous une fable à la fois allégorique et profondément cruelle dans sa manière de pointer du bout de la caméra la violence - à la lisière de la xénophobie - qui caractérise le sort des migrants (jusque dans une utilisation du Nosferatu de Murnau comme métaphore de l'exploitation vampirique qui caractérise la relation, non seulement professionnelle mais aussi humaine, entre Mehdia et ses employeurs).

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Copyright JHR Films


Tout n'est évidemment pas parfait, et le cinéaste semble parfois bien plus intéressé au fond par la crise identitaire et sociale qui bouscule le Liban que par ses personnages en eux-mêmes (pourtant joliment empathiques et incarnés avec justesse par Clara Couturet et Ziad Jallat), mais Dirty Difficult Dangerous sait captiver mais aussi et surtout éblouir son auditoire, en interrogeant la réalité actuelle tout en le poussant à la réflexion.

Jonathan Chevrier[CRITIQUE] : Dirty difficult dangerous