Ida Lupino, star et désormais réalisatrice-scénariste renommée et reconnue par ses pairs grâce à des films aussi audacieux que moderne avec "Avant de t'Aimer" (1949), "Faire Face" (1949) et surtout "Outrage" (1950). Pour la première fois, la cinéaste n'est pas à l'origine de ce nouveau projet et n'en signe pas le scénario. Il s'agit de l'adaptation du livre "American Girl" (1930) de John R. Tunis, ce dernier est alors connu pour ses romans sportifs, journaliste sportif et commentateur sportif particulièrement connu aux Etats-Unis et sur ce livre il s'inspire de la star de l'époque la tenniswoman Helen Mills (Tout savoir ICI !) dans un récit peu flatteur. Le scénario est écrit par Martha Wilkerson, néophyte dans le domaine mais très connue comme ayant été la DJ la plus connue de la radio auprès des GI's américain durant la Seconde Guerre Mondiale et qui poursuivre ensuite comme scénariste pour plusieurs séries TV. A noter que Ida Lupino est toujours co-productrice de ses films via sa société avec son époux Collier Young, qui a été son co-scénariste sur ses deux derniers films. Si la réalisatrice s'est attachée jusqu'ici à aborder des thèmes forts, voir tabous, sur des questions de société qui touchent essentiellement les femmes, cette fois le sujet est un peu plus universel même si elle prend une fois de plus des personnages principaux féminins... Jeune femme pleine de vie et espoir du tennis, Florence Farley fait le bonheur et la fierté de ses parents. Si son père est affectueux et laisse sa fille faire ses propres choix sa mère voit plus grand et s'organise pour que tout réussisse à sa fille et à sa carrière prometteuse pour en faire une championne...
Pour la première fois dans un de ses films, Ida Lupino fait appel à une star en tête d'affiche, ainsi la mère de la championne est incarnée par Claire Trevor vue notamment dans "La Chevauchée Fantastique" (1939) de John Ford, "Key Largo" (1948) de John Huston ou plus tard dans "L'Homme qui n'avait pas d'Etoile" (1955) de King Vidor. Le père est joué par Kenneth Patterson vu dans "Pour Toit j'ai Tué" (1948) de Robert Siodmak, et qui retrouvera Ida Lupino sur "Ici Brigade Criminelle" (1954) de Don Siegel. La petite championne est incarnée par Sally Forrest qui retrouve sa réalisatrice après "Avant de t'Aimer" (1949) et "Faire Face" (1949) et qui est alors à son apogée dans sa courte carrière avec "La Vallée de la Vengeance" (1951) de Richard Thorpe et "Le Château de la Terreur" (1951) de Joseph Pevney, elle retrouve après "Le Brigand Amoureux" (1948) de Laszlo Benedek son partenaire Carleton G. Young aperçu auparavant dans "Frisson d'Amour" (1945) de Richard Thorpe ou "Une Vie Perdue" (1947) de Stuart Heisler, et qui tourne cette même année aux côtés de Claire Trevor dans "Plus Fort que la Loi" (1951) de William D. Russell. Le fiancé est joué par Robert Clarke qui retrouve également Ida Lupino après "Outrage" (1950), et qui va devenir un spécialiste du film d'horreur et de SF de série B, en signant lui-même entre autre "The Hideous Sun Demon" (1959) ou en jouant dans "Le Voyageur de l'Espace" (1960) de Edgar G. Ulmer. Citons encore Joseph Kearns aperçu dans notamment dans "La Vie est Belle" (1946) de Frank Capra mais qui sera surtout populaire avec son personnage de Monsieur Wilson dans la série TV "Denis la Petite Peste" (1959-1962). Et enfin, outre le nouveau caméo de Ida Lupino, on remarque qu'elle est cette fois accompagné d'une grande star, Robert Ryan qui retrouve donc Carleton G. Young et Claire Trevor après "Plus Fort que la Loi" (1951) et surtout qui s'apprête à jouer avec Ida Lupino dans "La Maison dans l'Ombre" (1952) de Nicholas Ray... La première chose qui choque, ou plutôt qui laisse légèrement perplexe est l'affiche du film légèrement racoleuse qui ne rend pas honneur au film, et même laisse une sensation bien trompeuse. Pas la moindre nuance pseudo-érotique dans ce film, que ce soit par un biais comique ou non. Le scénario s'avère plus basique que les films précédents de Lupino, plus linéaire et avec un traitement psychologique plus commun ou moins surprenant. Ainsi, dès le début on sait que c'est l'ambition de la mère qui va gérer et diriger la carrière de sa fille qui, si elle aime vraiment le tennis, reste une fille pourrie-gâtée qui ne fait rien sans que ce soit pour faire plaisir à ses parents, à sa mère surtout qui vampirise sa fille grâce ou à cause d'un père témoin et lucide mais complètement passif.
Premier bémol donc, le film dessine un portrait de père bon, gentil vertueux alors qu'au final sa passivité engage forcément un minimum de responsabilité. Idem, la mère est montrée comme une femme à l'ambition dévorante et vénale prête à tout (subtilement suggestif) mais cela est aussi pour le rêve intial de sa fille qu'on le veuille ou non, qui est avant tout biaisé parce qu'elle tombe amoureux d'un homme ex-espoir du tennis qui est finalement un mix inverse des parents ; montré comme un homme aimant et vertueux voir moral et moralisateur il n'est au fond qu'un homme machiste et égoïste qui préfère voir sa fiancée proche de lui comme future mère au foyer. On s'aperçoit avec étonnement que ce film est le premier de Ida Lupino qui est si manichéen et si peu nuancé, le fait qu'elle ne soit pas à l'écriture à forcément joué. Les personnages ne sont pas ce qu'ils sont, est-ce là aussi ce sur quoi a voulu jouer la réalisatrice ?! Néanmoins on est un peu déçu par des personnages trop caricaturaux et/ou montrés autrement que ce qu'ils sont sans que ça donne un message ou un propos de fond. La jeune femme reste symptomatique de ce soucis, où elle est une gamine écervelée et naïve dont la réplique principale se résume à "Ne serait-ce pas merveilleux !", puis ensuite se changer brutalement en femme lucide voir cynique au risque de se perdre elle-même. Le film a ckairement dû donner des idées, d'abord pour "Mademoiselle Gagne-Tout" (1953) de George Cukor avec le couple Katherine Hepburn-Spencer Tracy, mais plus récemment on pense à l'ambition paternelle dans "La Méthode Williams" (2022) de Reinaldo Marcus Green. En conclusion, le premier film "mineur" de Ida Lupino dont on ne reconnaît que trop l'acuité et la modernité habituelle même si la dimension psychologique reste passionnante, et que finalement c'est la performance de Claire Trevor qui reste l'atout du film.
Note :
13/20