Je s’appelle Groot.
Voilà, c’était ma critique du film Les Gardiens de la Galaxie vol.3.
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Vous êtes toujours là? Vous croyez qu’il y a une ligne post-critique, comme il peut y avoir des scènes post-générique chez Marvel? Ben non, hein… Au prix où on me paie…
Ah, d’accord, c’est parce que vous ne parlez pas le Groot couramment et que vous avez besoin d’une traduction de ma critique… Mais comment est-ce possible ? Parce que si vous êtes là, c’est que vous avez déjà vu les deux premiers volumes (sinon, commencez par ça, c’est mieux), et probablement les autres films Marvel où apparaissent Star-Lord, Gamora, Drax le destructeur, Rocket, Groot, Mantis et Nébula (Avengers : Infinity wars, Avengers : endgame, Thor : Love and Thunder). Donc, ça vous laissait le temps d’apprendre à parler le Groot couramment. Surtout que c’est assez basique comme vocabulaire : “Je s’appelle Groot” et “Nous s’appelle Groot” sont les seuls mots à connaître, mais il est vrai que l’apprentissage de la langue nécessite aussi une gestuelle, un regard et une intonation spécifique en fonction des circonstances qu’il n’est pas donné à tout le monde de saisir.
Bon OK, je vais développer un peu mon texte… Pff… Moi qui pensait tranquillement retourner à la sieste après avoir signé la critique la plus concise du monde, c’est raté…
Ce troisième volume se déroule quelques temps après la défaite de Thanos. Après avoir un peu bourlingué avec Thor, ils ont décidé de se poser, le temps de reconstruire Knowhere, la forteresse qu’ils ont rachetée à Tivan, le collectionneur. Le temps, également, à Peter Quill (Chris Pratt) de se reconstruire après avoir perdu la femme qu’il aime, Gamora (Zoe Saldana). Enfin, plus ou moins perdu… La Gamora dont il était amoureux a été tuée par Thanos, sacrifiée pour l’acquisition d’une des pierres d’éternité dont le tyran galactique avait besoin. Mais une version alternative du personnage, issue du multiverse, a pris sa place durant le combat final d’Avengers : endgame. Seul problème, dans sa réalité initiale, cette Gamora n’a connu aucune des aventures précédentes des Gardiens de la Galaxie et n’a donc jamais noué d’idylle avec Star-Lord. Alors, celui-ci encaisse mal le coup. Il passe ses journées à picoler pendant que ses camarades essaient de rebâtir la communauté.
Mais chez Marvel, les héros ont rarement du répit. Adam, surnommé “Warlock” (Will Poulter) débarque comme une furie avec pour seul objectif de régler son compte à Rocket, qui avait commis l’impudence de voler quelques batteries à sa maman, Ayesha, dans le volume 2. Hormis Peter, en train de cuver, les gardiens tentent de l’arrêter, mais le garçon a de la ressource. Il réussit à assommer Drax (Dave Bautista) et élaguer Groot façon puzzle avant de se faire neutraliser par Nébula (Karen Gillan). Et surtout, il blesse très grièvement Rocket. En cherchant à le soigner, les camarades du sympathique raton-laveur découvrent qu’il est relié à un dispositif d’auto-destruction qui le tuera à coup sûr s’il n’est pas désamorcé dans les 48 heures. Pour cela, l’équipe doit se rendre sur le lieu où Rocket a été conçu, un laboratoire scientifique appartenant à la société Orgocorp, créée par un mégalomane auto-baptisé “Le Maître de l’évolution”.
Par des flashbacks, on comprend que le raton-laveur le plus badass de la galaxie est le fruit d’une expérience scientifique tordue qui a bien tourné (pour lui) mais lui a laissé quelques souvenirs amers. Le Maître de l’évolution a lui aussi quelques mauvais souvenirs de leur dernière confrontation, mais il est obsédé par l’idée de retrouver son cobaye et de finir le travail en le disséquant des pattes à la tête… La mission des gardiens a donc tout du piège grossier. Et même si Star-lord s’entête à penser que, puisqu’il savent que c’est un piège, cela devient un “face-à-face”, la tâche ne s’annonce pas très facile face au maître de l’évolution et ses sbires surentraînés, ainsi qu’à un Warlock revanchard…
Voilà pour le pitch. Euh… Pas sûr que ce soit beaucoup plus clair qu’avec “Je s’appelle Groot”. Surtout pour ceux qui n’ont vu aucun des films de la saga ou les deux derniers Avengers. A vous, je le redis, commencez par regarder tout ça, sinon votre esprit va être aussi entortillé que les racines de Groot pour comprendre les tenants et les aboutissants de cet épisode… Pour les autres, que dire d’autre? Eh bien que Les Gardiens de la Galaxie correspond exactement à ce que l’on pouvait en attendre : un divertissement très efficace, mené tambour battant (même si le dénouement traîne un peu en longueur, comme si James Gunn, pour ses adieux à la saga et à Marvel (1), avait du mal à quitter son bébé).
Il y a tous les ingrédients nécessaires à un film réussi : de la science-fiction, un bestiaire fantastique impressionnant, bénéficiant des technologies de pointe en matière d’effets visuels et d’animatronique, de l’aventure (beaucoup), de l’action (bagarres, fusillades, courses-poursuites et explosions), du suspense (car on sait désormais que Marvel n’a plus aucun scrupule à faire mourir des personnages-vedettes et que l’on craint jusqu’au bout qu’il arrive malheur à des membres de l’équipe), une pointe de romance, beaucoup d’humour et pas mal de drame également. Si, si, vraiment. On vous met au défi de ne pas verser une petite larme devant le destin réservé aux trois camarades de labo/cellule de Rocket : Lylla, Moustaches (Teefs en anglais) et Sol (Floor). Car le film a aussi un fond engagé, “cruelty free”, qui dénonce les expérimentations sur les animaux et leurs dérives.
Evidemment, le récit insiste beaucoup sur les valeurs fondamentales qui cimentent le groupe de héros : la camaraderie, l’entraide, l’acceptation des autres avec leurs défauts et leurs qualités, chacun apportant des choses complémentaires, le sens du devoir et du sacrifice. Autant de valeurs promues depuis longtemps par la maison Disney, propriétaire des Studios Marvel, et qui pourront, on l’espère, être ainsi inculquées aux jeunes spectateurs (2) et à certains adultes aussi – certains en auraient bien besoin. La vraie force des trois films de la saga Les Gardiens de la Galaxie, c’est vraiment cet esprit collectif et les liens qui se nouent à l’intérieur du groupe, petit à petit. Au départ, ce sont tous des canailles, d’une certaine façon. Quill est un voleur, Gamora, la fille de Thanos, officie pour papa comme tueuse à gages. Rocket et Groot sont des chasseurs de primes et évoluent en marge de la société. Drax est taulard. Ils sont tous rivaux et hostiles les uns aux autres avant de sympathiser et faire cause commune, pour le bien des habitants de la galaxie. Nébula est leur ennemie avant de rejoindre la bande. Ils évoluent au contact des autres – et pas grâce au maître de l’évolution…- et trouvent dans cette communauté une famille de substitution, qui leur permet de s’épanouir pleinement. Le spectateur s’attache aussi à eux et a lui aussi l’impression de faire partie de cette joyeuse bande, ce qui participe pour beaucoup à l’appréciation de l’oeuvre.
Bon, me direz-vous, le divertissement, c’est très bien, l’émotion et l’attachement aux personnages, c’est parfait, mais et le Cinéma dans tout ça? Hein, est ce qu’artistiquement, on a droit à quelque chose de valable? Hé bien oui! Vous en connaissez beaucoup, vous des films de super-héros qui commencent par un long plan-séquence? Rocket, en plein spleen post guerre cosmique et submergé par le souvenir de sa “naissance” lance la chanson “Creep” de Radiohead sur le Zune de Peter. Il chante quelques mesures pendant que la caméra virevolte d’un personnage à l’autre, montrant la vie qui reprend peu à peu dans le quartier général des gardiens. C’est d’une belle fluidité et permet d’entrer tout de suite dans ce récit. Alors que certains cinéastes se seraient contentés d’une mise en images bien plan-plan, laissant les experts en effets visuels faire tout le boulot, James Gunn s’applique à trouver les bons angles de prises de vue, le bon tempo pour chaque scène, ce qui lui permet de donner à ses films un dynamisme singulier, très supérieur à bien d’autres films du MCU, un peu trop formatés. Surtout, il soigne autant ses scènes intimistes que ses scènes d’action. C’est aussi cela qui lui permet de faire autre chose qu’un simple film de super-héros et de toucher un plus large public. Pour autant, il ne bâcle pas du tout ses scènes d’action. Et il y en a un paquet, avec quelques moments mémorables. La vision d’un Groot pistolero, une arme dans chaque branche est par exemple une trouvaille assez jubilatoire et la scène de bagarre précédant le grand final est magnifiquement chorégraphiée.
Tout concourt à faire de ce troisième volume une belle conclusion à la saga. On sent que le cinéaste et ses comédiens ont pris beaucoup de plaisir à tourner ensemble une dernière fois avant de partir vers de nouveaux horizons. Alors, est-ce que cela veut dire que c’est la fin pour les Gardiens de la Galaxie? Sous cette forme, assurément. C’est la fin d’un cycle. Le réalisateur a déjà changé de crèmerie et plusieurs acteurs ont émis le souhait de passer à autre chose que le MCU. Mais l’avantage de cet univers cinématographique hors normes façonné par Marvel depuis une quinzaine d’années, semblable à celui des comics books de la maison, est que l’on peut toujours introduire de nouveaux acolytes aux héros et continuer l’aventure autrement.
Les deux scènes additionnelles, à mi-générique et post-générique, donnent en tout cas la réponse. Oui, il y a encore une équipe pour protéger la galaxie (qu’ils viennent faire un tour sur Terre, car il y aurait un peu d’ordre à mettre…) et oui, un personnage emblématique reviendra bien dans le futur. Ah! Je s’appelle Groot!
C’est bon, là? Cela vous convient mieux comme texte? Alors je retourne à mes pigeons… Il y en a un qui a eu l’outrecuidance de se poser sur le rebord de la fenêtre. Je vais lui dégommer les plumes à coups de laser, en attendant de maîtriser la télékinésie ou le sifflement pour la flèche de Kraglin. Ca lui fera les pattes! Mais avant cela, je lance la bande-son : “Come and get your loooove!”.
Je s’appelle Gala et je vous envoie plein de ronrons! Joob-Joob!
(1) : James Gunn va désormais se concentrer sur l’univers concurrent, dans la catégorie films de super-héros. Il intègre DC Films pour lequel il a déjà réalisé The Suicide squad et dont il devient co-directeur.
(2) : Le film est classifié tous publics, mais attention toutefois, aux plus jeunes, qui pourraient être traumatisés par certaines situations et certains personnages, à commencer par la tête “en carpaccio” du Maître de l’évolution.
Les Gardiens de la galaxie vol.3
Guardians of the galaxy vol.3
Réalisateur : James Gunn
Avec : Chris Pratt, Zoe Saldana, Dave Bautista, Pom Klementieff, Karen Gillan, Will Poulter, Elizabeth Debicki, Chukwudi Iwuji, Sylvester Stallone et les voix de Bradley Cooper et Vin Diesel
Genre : Super film
Origine : Etats-Unis
Durée : 2h30
Date de sortie France : 03/05/2023
Contrepoints critiques :
”Tout cela respirait le neuf en 2014 mais, en 2023, les Gardiens de la galaxie sentent plutôt le renfermé. Il est vraiment temps de prendre congé.”
(Philippe Guedj – Le Point)
”Peu importe que les personnages aient des poils, de la fourrure, des antennes ou un problème avec le second degré, il n’est question que d’humanité et de solidarité dans ce troisième volet. Il ne s’agit pas de sauver une planète ou le Multivers, d’arrêter un gros méchant qui menace le monde, mais de sauver l’un des leurs. Tout simplement.”
(Deborah Lechner – Ecran Large)
Crédits photos : Copyright 2022 Marvel