Film unique d'un réalisateur inconnu, qui avait tout de film Z fauché, et qui va devenir des décennies après un film culte. Il s'agit du cinéaste Herk Harvey, qui travaillait depuis 1952 pour la Centron Corporation, une compagnie de production de films éducatifs et institutionnels de la ville de Lawrence (Kansas) et qui ne quittera cette compagnie qu'en 1985 pour sa retrait. Il eût l'idée et l'envie de réaliser son premier long métrage de fiction après avoir remarqué un étrange bâtiment sur les bords du Grand Lac Salé qui lui alors inspiré vaguement une histoire imaginant "des morts danser dans une salle de bal au bord du Grand Lac Salé." À la même période, il lit un article sur un fait divers dans un journal de Topeka (Kansas) et va se lier d'amitié avec l'auteur, John Clifford, un écrivain à qui il demande d'écrire un scénario autour de cette idée. Le cinéaste convainc ses responsables de chez Centron de lui faire confiance, il réunit un budget serré de seulement 30000 dollars avec des investisseurs locaux et engagent des amateurs et inconnus pour le casting, dont la plupart originaires de sa ville de Lawrence. Après avoir posé des congés, toute l'équipe est parti tourné près de Salt Lake City en seulement 2 semaines. Le film a été prévu avec des versions oscillant entre 78 mn et 91mn pour convenir aux différentes demandes de distributeurs de salles et de drive-in. La durée de 78mn a été celle la plus diffusées dans les cinémas, mais la durée de 91mn est celle du montage original. Il existe aussi une version colorisée (rare) dans laquelle les fantômes demeurent en Noir et Blanc. Le film passe quasi inaperçu et fait un bide au box-office avant d'être retirer assez rapidement des programmes. C'est en 1989 que des cinéphiles redécouvrent le film. Une renaissance inespérée qui poussèrent le réalisateur (alors en retraite) et le scénariste à participer à des conférences, le film reçut des prix avec un regain d'intérêt jusque dans la presse spécialisée. Et enfin, une édition DVD de la prestigieuse collection Criterion voit le jour à la fin des années 90, que malheureusement Herk Harvey ne verra pas, mort en 1996 d'un cancer...
Alors que des jeunes gens font la course en voiture, une des deux autos où se trouvent des jeunes femmes chute dans une rivière après une perte de contrôle. De façon inexpliquée, une seule jeune femme en réchappe. Remise, elle déménage en Utah où elle a trouvé un travail de organiste dans une église. Elle trouve un logement dans une pension où elle vit avec la logeuse et un autre colocataire un peu trop entreprenant. Mais la jeune femme semble voir des fantômes, tandis qu'elle est irrémédiablement attirée par un grand immeuble désaffecté... Au casting, le réalisateur a engagé pour le rôle principal une jeune comédienne qui tente de percer alors à New-York où elle joue dans des pièces de théâtre, pour la télévision et danse dans un night-club, Candace Hilligoss qui ne percera pas au vu de l'échec du film et malgré une autre tentative avec le film d'horreur "The Curse of the Living Copse" (1964) de Del Tenney. Parmi ses partenaires citons dans les rôles principaux les acteurs Frances Feist, Sidney Berger, Art Ellison, Stan Levitt sans oublier le réalisateur lui-même qui s'octroie le rôle emblématique de l"'homme inquiétant"... Le film débute dans un Noir et Blanc très lumineux, dans une séquence très "la Fureur de Vivre" (1955) de Nicholas Ray, où des jeunes hommes dans leur bolide font la course avec la voiture de jeunes femmes. Le récit débute vite et entre dans le vif du sujet aussitôt. Une ouverture efficace qui mène à une ellipse par contre un peu trop expédié, où comment la jeune femme survivante passe de son sauvetage à son nouveau travail en aussi peu de temps qu'il faut pour le dire. Une ellipse un peu maladroite où on remarque surtout une actrice principale qui ne semble pas particulièrement talentueuse.
Le réalisateur impose une atmosphère pesante, mystérieuse hantée par une musique d'orgue envoûtante mais qui est aussi parfois assez irritante car trop omniprésente et surtout sans inspiration mélodique ; un bon compositeur aurait été judicieux. Le plus épatant dans ce film est qu'il n'use pas des éléments habituels du film d'horreur. Ainsi, pas de porte qui grince, pas de Jump Scare (sursaut par apparition soudaine) , encore moins de sang ou de violence. Juste quelques apparitions plus ou moins énigmatiques et plus ou moins brumeuses, une paranoïa (ou non !) de la jeune femme, dans une ambiance à la fois mystique (orgue, église, prêtre) et très terre à terre (co-locataire dragueur, rappel de la loi), et une récit dont on attend logiquement le twist. Plus thriller psychologique que film d'épouvante on note en tous cas un certain génie avec une optimisation des décors notamment, un climax efficace avec un budget ridicule. Pas étonnant que ce film ait connu une reconnaissance tardive et, surtout, qui a inspiré quelques grands noms du cinéma. D'abord cette renaissance a aussi donné un remake, dont l'actrice Candace Hilligoss avait lancé l'idée avant d'être écartée peu élégamment, ce sera un remake (1998) de Adam Grossman et Ian Kessner dont la promo reposait sur le nom de Wes Craven alors auréolé du succès de "Scream" (1996) mais ce remake sera aussi vite tourné qu'oublié. Surtout on notera que les films "L'Au-Delà" (1981) de Lucio Fulci ou "Sixième Sens" (1999) de M. Night Shyamalan sont clairement très inspirés par "Le Carnaval des Âmes", film qui a été aussi cité comme une forte influence par les réalisateurs George A. Romero ou David Lynch.
Note :