Acteurs : Marilyne Naaman, Antoine Merheb Harb, Nathalie Baye,...
Distributeur : JHR Films / Jour2Fête
Budget : -
Genre : Drame, Romance.
Nationalité : Français, Libanais.
Durée : 1h23min.
Synopsis :
Liban, été 1958. Trois sœurs de la bonne société chrétienne sont en villégiature dans la montagne libanaise. La vie tranquille du village est bousculée par les échos d'une révolution grondant à Beyrouth et par l’arrivée de deux estivants français. Mais c'est de l'intérieur de la famille que viendra le bouleversement. L'aînée des sœurs, Layla, mère et épouse parfaite, va ouvrir les yeux sur la société patriarcale qui les tient sous contrôle. Dans le jeune Liban qui rêve d'un âge d'or, une femme peut-elle avoir un autre destin que celui tracé par les hommes ?
Critique :
Dans la destinée d'une épouse perdue dans un mariage sans amour, Carlos Chahine trouve le terreau parfait pour faire de son #LaNuitDuVerreDEau autant un touchant portrait d'une femme en conflit, qu'une réflexion brute sur le Liban de la fin des 50s, à l'aube d'une révolution. pic.twitter.com/wpRgjxHFSc
— Fucking Cinephiles (@FuckCinephiles) June 13, 2023
À l'image de nombreux pays dont la démocratie se fissure au fil des années sous le poids - entre autres - de la corruption, et dont les tensions entre la population et le gouvernement sont au bord de la rupture, le cinéma libanais fait de plus en plus entendre sa voix et voit émerger des cinéastes exposant sans phare les maux qui ravagent leur nation.
On pourrait, de mémoire, citer la verve et les travaux de jeunes cinéastes tels que Mounia Akl (Costa Brava, Lebanon), le très " Antonionien " Ely Dagher (Face à la mer), Wissam Charaf (Dirty Difficult Dangerous) où encore Joana Hadjithomas et Khalil Joreige (Memory Box).
Une jolie liste dans laquelle figure désormais Carlos Chahine, dont le très beau premier long-métrage, La nuit du verre d'eau, ne se fait pas une radiographie du Liban contemporain mais bien une plongée délicate et intime dans son passé, à quelques encablures d'une guerre civile qui allait bientôt tout réduire à cendres.
Copyright Sarmad Louis
Dans un village isolé et à la beauté sauvage, flanqué à la périphérie d'une Beyrouth de la fin des années 50 où les tensions politiques et sociales dessinent déjà, inéluctablement, l'avenir sombre qu'attend la nation, le wannabe cinéaste s'attache à conter la quête d'émancipation d'une épouse/mère modèle, Layla, enfermée dans un mariage sans amour autant qu'une société patriarcale anxiogène.
Elle dont l'adultère n'est pas tant l'expression d'une passion enfin embrassée et sincère que celle, sentimentale et charnelle, d'un espoir d'ailleurs, même illusoire, loin d'un pays de plus en plus divisé et hermétique à sa mixité/diversité jusqu'ici pacifique (l'homophobie, la guerre entre chrétiens et musulmans,...), loin de terres et d'une emprise masculine qui fissure l'innocence de son enfant, Charles, bien conscient du chamboulement intime que vit sa mère.
En la destinée de cette âme rebelle qui rejete tous les oripeaux infériorisant de la société patriarcale pour enfin épouser une certaine idée (même la encore corsetée) de liberté, Carlos Chahine trouve le terreau parfait pour faire de La nuit du verre d'eau autant un touchant et vivant portrait d'une femme en conflit (magnifique Maryline Naaman), qu'une réflexion captivante et brute sur le Liban de la fin des 50s, à l'aube d'une révolution.
Jonathan Chevrier