4ème long métrage de la réalisatrice Justine Triet après "La Bataille de Solférino" (2013), "Victoria" (2016) et "Sybil" (2019) et coup de maître puisqu'elle obtient grâce à lui la Palme d'Or au dernier Festival de Cannes 2023. Pour ce nouveau projet la cinéaste voulait raconter faire un parallèle symbolique entre la chute littérale d'un corps et la chute d'un couple et donc de son histoire d'amour. Comme pour son dernier film, elle co-écrit son scénario avec son conjoint Arthur Harari réalisateur de "Diamant Noir" (2015) et surtout du magnifique "Onoda, 10000 Nuits dans la Jungle" (2021). Si l'histoire n'est pas directement tirée d'une histoire vraie la cinéaste a fait appel à un véritable avocat pénaliste, Vincent Courcelle-Labrousse pour pas le nommer, comme conseiller technique afin d'être le plus authentique possible sur l'aspect juridique et sur la conception française d'un procès... Sandra et Samuel vivent avec Daniel leur jeune fils malvoyant en montagne dans un lieu isolé depuis un an. Un jour, alors que Daniel rentre d'une promenade et trouve son père mort au pied de leur maison. Dans un premier temps tout semble indiquer qu'il serait tomber de la fenêtre. Une enquête pour mort suspecte est ouverte et bientôt Sandra est inculpée mais le doute persiste, suicide ou homicide ? En l'absence de témoin, Daniel devient une source nécessaire et essentiel pour les enquêteurs bien malgré lui...
Le jeune Daniel est interprété par Milo Machado Graner pour sa première apparition au cinéma, sa mère inculpée est incarnée par Sandra Hüller remarquée dans "Toni Erdmann" (2016) de Maren Ade, qui retrouve sa réalisatrice après "Sybil" (2019), et vue depuis dans "Proxima" (2019) de Alice Winocour ou "L'Etau de Munich" (2021) de Christian Schowchow, le mari est joué par Samuel Theis vu entre autre dans "La Princesse de Montpensier" (2010) de Bertrand Tavernier, "Nos Futurs" (2015) de Rémi Bezançon et "Petite Nature" (2020) de lui-même, retrouvant ainsi après son film l'acteur Antoine Reinartz vu dans "Chanson Douce" (2019) de Lucie Borleteau ou "Arthur Rambo" (2021) de Laurent Cantet, il retrouve après "120 Battements par Minute" (2017) de Robin Campillo sa partenaire Saadia Bentaïeb vue récemment dans "La Page Blanche" (2022) de Murielle Magellan ou "Normale" (2023) de Olivier Babinet. Citons encore Swann Arlaud vu dernièrement dans "A Propos de Joan" (2022) de Laurent Larivière ou "L'Etabli" (2023) de Mathias Gokalp, Jehnny Beth vue dans "Les Olympiades" (2021) de Jacques Audiard, "En Même Temps" (2022) de Benoît Delépine et Gustave Kervern et "Don Juan" (2022) de Serge Bozon, Camille Rutherford vue dans "After Blue (Paradis Sale)" (2021) de Bertrand Mandico, "La Nuit du 12" (2022) de Dominik Moll et "Les Trois Mousquetaires : D'Artagnan" (2023) de Martin Bourboulon, Anne Rotger vue récemment dans "La Grande Magie" (2023) de et avec Noémie Lvovsky, puis Sophie Fillières morte récemment, réalisatrice qui avait déjà été actrice pour son amie dans "Victoria" (2016), puis n'oublions pas monsieur Arthur Harari qui a joué dans tous les films de sa conjointe, mais aussi dans "Le Lion est Mort ce Soir" (2017) de Nobuhiro Suwa et "Le Procès Goldman" (2023) de Cédric Khan... Le film est un film de procès, et dans ce sous-genre il y a le risque d'être soit trop ennuyeux ou trop bavard, puis le risque d'être trop linéaire ou sans suspense. Et si ici Justine Triet impose un climax inquiétant et pesant dès les premiers instants on constate ensuite que son film est bel et bien sans enjeu véritable et dans un environnement trop froid ou trop sage, trop limpide aussi même si des artifices narratifs tentent de nous faire croire le contraire.
L'enquête est logique au vu du drame "domestique", on apprécie aussi le réalisme des procédures et notamment dans le déroulement du procès et dans les joutes relationnelles entre les parties, procureurs, avocats ou magistrats qui dénotent avec le système américain que beaucoup trop de citoyens français prennent comme institutionnel même sur leur propre territoire. Pourtant, le film et donc Justine Triet oubli que le Parquet "veille à la manifestation de la vérité à charge et à décharge", ce qui n'est absolument pas le cas ici ou le procureur est clairement et aveuglément à charge. Ce qui a deux effets, le premier tue le suspense à être trop à charge on devine le final, le second on donne une sensation désagréable d'un être gratuitement abject voir peut-être sexiste ce qui n'apporte rien de constructif à l'intrigue principale, ainsi le procureur devient si antipathique qu'à l'inverse on finit par avoir de l'empathie pour cette accusée dont... ATTENTION SPOILER !... les seules fautes apparentes est d'avoir "fautée" alors que le couple était déjà en crise, et d'avoir reprise une idée d'écriture pour un livre avec l'accord de son conjoint alors que lui-même est effectivement un homme paumée qui se victimise, en tous cas le procès le démontre sans que la réalisatrice-scénariste le veuille nécessairement, dommage donc... FIN SPOILER !... Résultat, plus on avance dans le procès et plus le suspense s'évapore et arase tout enjeu véritable quant à l'issue du procès. Il reste donc la position de l'enfant, qui officiellement 11 ans mais qui a l'intelligence et/ou la lucidité d'un ado bien plus âgé ce qui lui retire aussi toute l'innocence qui fait d'un enfant un enfant en décalage avec les vices adultes. Justine Triet a voulu un regard d'enfant qui n'en est pas "assez" un finalement, trop mature pour surprendre dans ses émotions, tandis que le procès dissèque méthodiquement une relation conjugale plutôt que les faits autour de l'enquête du drame. On passera sur ce flash-back un peu racoleur sans doute inutile, mais surtout décevant de par sa présence même puisque la cinéaste justifie "L'absence de flash-back était une volonté dès le départ. Je n'aime pas ça dans les films..." Par contre, superbe performance de Sandra Hüller qui fait passer les ambiguités de son personnage et compense ainsi là où le scénario pêche. Bref, malgré une Palme d'Or le premier film de la réalisatrice qui déçoit...
Note :
09/20